Je suis déçu…
Pas parce que le film est mauvais, mais il ne me parle pas, il ne me touche pas, à la différence des précédents films d’Anderson.
Pourtant il n’est certainement pas dénué de qualités. C’est un film d’aventure au rythme étourdissant, dans lequel les cadres du cinéaste n’ont jamais été autant proches de la bande dessinée, et qui parvient à mêler avec un certain brio une multitude de mouvements (évasion, poursuite, suspense, horreur, burlesque, drame, romance,…), de lieux, d’époques.
Le film me semble surtout tirer son intérêt majeur par ce qu’il raconte sur l’héritage, que Wes Anderson décline sous de multiples formes. L’héritage au sein du récit, l’héritage lié à la transmission du récit, de bouche à oreille, d‘époque à époque, et l’héritage lié à la façon de conter ce récit (Hergé, Hitchcock, …). L’héritage, la transmission, étant un thème central au sein de l’œuvre d’Anderson, qui s’est bâtie sur la question des rapports familiaux.
Mais au-delà de ça je le trouve froid, sec. Le mouvement dans les cadres fixes du cinéaste est omniprésent, mais il n’y a pas de vie. Le cinéma d’Anderson a toujours abordé les personnages comme des vignettes qui s’animent. Mais contrairement à ses films précédents, ici je ne vois pas ces vignettes se soulever de la feuille et prendre vie. On reste au stade de l’illustration. Et ce sentiment est renforcé par l’accumulation des caméos et la richesse du casting. Le côté familial d’Anderson me plait, j’aime voir sa troupe de film en film, mais ici je trouve qu’ils n’ont pas grand-chose à jouer. Ils apparaissent et disparaissent sans réellement laisser leur empreinte dans le cadre. Mais le plus inquiétant, c’est que ce sentiment est également valable pour les personnages principaux.
Et du fait je regarde les personnages virevolter dans le plan sans jamais m’y attacher.
Je sens bien ici, qu’il y a le sentiment d’une mélancolie latente, sur la fin d’une époque, sur la décrépitude d’un monde, et la confrontation d’une conception de la beauté et d’un mode de vie (la dandysme par exemple) face à une idée de l’horreur, ici le fascisme.
Mais cette mélancolie n’est jamais portée à l’image, ni par l'image, elle reste sur le papier, alors qu’elle transpirait dans chaque plan de la vie aquatique, Darjeeling Limited, Rushmore, Fox,…
Enfin, il y a presque toujours chez Anderson une image-clé. Celle qui surgit pour éclairer tout le reste, celle qui déborde du récit et fascine par sa façon de matérialiser quelque chose que l’on pensait ne rester qu’au stade de l’imaginaire, je pense au requin dans la vie aquatique, ou au loup dans Fantastic M. Fox, par exemple. Cette image, ici, est employée différemment, et son impact n’a pas la même intensité. Je pense qu’il s’agit du plan sur l’Hôtel Budapest au début du film, avec ses façades roses et son architecture de maison de poupée. La différence avec les images-clé des autres films, c’est sa position dans le film, mais surtout sa position au sein de la progression narrative. Le loup, le requin, sont des images imaginaires que les personnages évoquent, et voir l’image réellement apparaître dans le cadre et une sorte d’accomplissement. Ici le chemin est inverse. On n’avance pas vers l’image, on la voit s’éloigner dans le rétroviseur. On la garde en mémoire, figée comme une maison de poupée, alors que le temps agit sur elle en la transformant en ruine, petit à petit.
C’est à partir de cette image que la mélancolie du film aurait dû se déployer. Mais il manque quelque chose pour que ça arrive vraiment.
Teklow13
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le 27 févr. 2014

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Teklow13

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