Dandy des lettres, provocateur au verbe haut et à la morgue cynique, Oscar avait tout pour choquer la prude Angleterre. Born to be WIlde ! Et son homosexualité, c'était l'assurance de gros ennuis et d'une inéluctable déchéance. C'est cette dernière partie de la vie de l'écrivain irlandais que Rupert Everett a choisi de conter dans The Happy Prince, entre Dieppe, Naples et Paris. Un parti pris qui permet d'éviter les raccourcis d'un biopic mais qui l'oblige cependant à toute une série de flashbacks servis dans un grand désordre. Encore heureux que certaines scènes nous montrent le succès de l'auteur de pièces raffinées et caustiques car sinon l'esprit si vif et acéré de WIlde serait totalement absent d'un long-métrage qui insiste douloureusement (et avec complaisance ?) sur sa disgrâce. Rupert Everett, qui a joué avec infiniment de talent dans les adaptations d'Un mari idéal et de L'importance d'être constant, n'hésite pas à parler de parcours "christique" concernant la chute d'Oscar Wilde. Peut-être, en effet, mais cela n'empêche pas de trouver que le cinéaste s'est un peu égaré dans un exercice narcissique où le réalisateur s'efforce de faire briller l'acteur, se rendant à peine compte que l'exercice est autant narcissique que terriblement pathétique, à certains moments (la comparaison avec Mort à Venise se fait naturellement). Ce portrait d'Oscar Wilde, sous couvert de plaidoyer pour la tolérance et la liberté, est assez triste et peu flatteur, en définitive, et semble un prétexte pour flatter l'égo de son auteur.