Visiblement agacé par le fait que les westerns omettent souvent l'existence d'Afro-américains dans le vieil Ouest, Jeymes Samuel cherche ici à corriger le tir, de manière volontairement outrancière. Il reprend ainsi des figures noires historiques de l'Ouest, pour les combiner dans une intrigue totalement fictive. On se retrouve donc dans un univers original, où presque tous les personnages sont noirs, les blancs étant relégués à une poignée de troisièmes rôles peu glorieux.
Et rapidement, "The Harder They Fall" donne le ton. Le film se réapproprie les codes du western classique, pour mieux les déconstruire et les réassembler à sa sauce. Un peu comme "Le Bon, la Brute, et le Cinglé", où Jim Jee-woon transposait ces codes dans la Manchourie des années 30, Jeymes Samuel joue avec eux, faisant mine d'amener le spectateur dans une zone de confort, pour mieux le déstabiliser.
On démarre par exemple avec une séquence de meurtre et une intrigue de vengeance, évoquant "C'era una volta il West", appuyée par une musique conventionnelle. Pour embrayer rapidement vers de la soul et autres musiques associées à la culture afro-américaine. Et le film jouera en permanence entre le respect des codes et leur "trahison", avec une mise en scène bien relevée.
Outre des fusillades dynamiques et des confrontation tonitruantes, "The Harder They Fall" propose une imagerie colorée de très bel effet, exploitée par plusieurs originalités bienvenues : un combat dans une teinturerie, la perception qu'ont les Noirs d'une ville "blanche"...
Et le thème de la vengeance est surtout un prétexte pour mettre son méchant sur un piédestal. Car si les acteurs du film sont très en forme, c'est Idris Elba qui ressort clairement. Esthétisé et présenté par la réalisation comme une espèce de force tranquille démoniaque, il fait partie des méchants dont l'aura en impose sur tout le film, malgré le fait qu'il parait agir peu.
"The Harder They Fall" est donc une très bonne surprise, qui fait partie des œuvres ré-inventant intelligemment un genre souvent perçu comme éculé.