C’est peu dire, si j’attendais le deuxième Bayona avec impatience. J’ai couru le voir au ciné, dès sa sortie. Tout d’abord, j’ai adoré. Je l’ai revu récemment, pour être sûr. J’avais peur du syndrome : Larmes de crocodiles. Et bien j’ai toujours la banane. Le film est bon. Le résultat est sans conteste à la hauteur de son talent. Encore une fois, il a choisit un sujet IMPOSSIBLE. Encore une fois, le spectacle est grandiose. Encore la maîtrise, encore la beauté des images. De vrais peintres ces espagnols. La narration reste classique, mais le film a d’autres qualités. Mélo, et film catastrophe.
Imaginez, un millionnaire qui gagne au loto. La super cagnotte. Pas des clopinettes, mais le SUPER GROS LOT !! C’est l’effet que ça fait, de voir ce film. Une famille qui a tout pour elle. Médecins, 3 enfants, beaux, en vacances, blonds aux yeux bleus, et qui tombe dans un Enfer, façon Dante ; et ressort sans une égratignure sur sa carrosserie neuve. (Á part la mère qui à quelques « petites » stigmates physiques), mais ça, c’est rien, comparé au carnage, et la centaine de milliers de morts, après le Tsunami. Incroyable mais vrai !
Voilà (enfin), une histoire vrai qu’elle est intéressante, justement parce qu’elle est un incroyable, et surtout, improbable. Cette famille séparée, éparpillée, par une vague géante, tueuse, qui a ravalé la surface de tout le littoral thaïlandais. Elle se retrouve quand même, saine et sauve, comme par miracle, et réunie contre toute attente, après bien des péripéties.(?) Cette famille est-elle bénie des dieux ? Elle gagne à la loterie de la vie, elle a tout pour plaire. Ces enfants blonds, qui ressemblent à des angelots, non ? Mais point de mysticisme chez Bayona. Il a transformé la famille d’origine, (histoire vraie), en blonds oxygénés, presque suédois. C’est parce qu’il a une idée derrière la tête, J.A.
Direction d’acteurs impecc. Petite pensée pour Naomi Watts, qui souffre mille morts dans ce film. Mais qu’est-ce qu’elle souffre bien ! J’adore. Oscar, raté. Ils sont nuls aux oscars. Effets spéciaux à tout CASSER. La vague géante, je l’ai encore dans la tête. Encore une fois, Bayona parle de la pulsion de vie, qui triomphe de la mort. La mort. Un hôtel quatre/cinq étoiles, qui se transforme, de lieu de cocagne, devient un marécage boueux, où baigne des cadavres, et des cocotiers tordus de douleur. Magma originel, où il n’existe plus que la survie, et le doute. Où sont les enfants ? Où est maman ? Papa est-il mort ? Magma originel, qui n’arrive pas à effacer le sourire des enfants. Adorables, et bien dirigés.
Le plus âgé, l’ado, Lucas, servira d’« homme » de substitution. Il sauvera sa mère, et deviendra un homme tout court. Tandis que le père, (Ewan McGregor), sera porté disparu avec les deux garçons en bas âge. Film un peu mélo, mais mélo adulte. Si on pleure, c’est pas sur un tapis de roses. C’est la peur au ventre, et le sentiment d’impuissance, le temps zéro, dû à n’importe quel accident post-nucléaire. Comme si le temps s’était arrêté tout seul, tout d'un coup. 250 000 morts plus tard, tout d’un coup! On n’aurait pas aimé être à leur place, c’est sûr. Une chance pareille, c’est IMPOSSIBLE. Pourtant si. Cette famille se joue du destin, et n’a même pas eut besoin de prier un dieu ou un autre. Comment traiter d’un sujet pareil, sans montrer le point de vue de Dieu ?
Bayona a franchi la ligne jaune. Il se prend pour Dieu. Et.
Il fait parler Dieu. Ce film c’est un miracle, vu du point de vue de Dieu, (donc du cinéaste). Dieu a choisit. Ce sera cette famille là, qui sera sauvé, et pas une autre.
« Mais pourquoi seigneur ? » demanderont les pauvres adorateurs, le chapelet à la main.
« Cette famille est riche, ne prie pas, ne rend pas grâce à Dieu, contrairement à tes humbles serviteurs, qui ont péris par milliers. On ne comprend pas.»
« Ta gueule, c’est moi qui choisit. » répondit Dieu, ce soir de décembre 2004. Cadeau de Noël surprise. Bayona nous montre comment Dieu a fait ce choix, qui semblerait bizarre aux yeux des pratiquants, des moralistes, des orgueilleux, du mérite…. Film sur un miracle, vu par un laïque, probablement athée. Est-ce moral de monter/montrer le choix de Dieu ? Surtout qu’il semble complètement partial, ou aveugle, le mec.
L’histoire de ce film, ce n’est donc pas parler du tsunami. LO IMPOSSIBLE. C’est impossible. Le titre le dit lui-même. Comment peut-on parler de ça au cinéma ? N’en déplaise aux esprits chagrins, le tsunami sert de fond de sauce, à une anecdote gigantesque par son absurdité même. Une absurdité miraculeuse. Bayona préfère retenir ça, entre accents de dolorisme, et retour à l’équilibre final. Le pragmatisme anecdotique, j’appellerais ça.
Un moment de chaos, mis en scène brillamment, sans s’inquiéter de morale, ou du sacro-saint consensus. C’est crû, pas cuit. Pas un regard pour les souffrances des autochtones. La survie d’une famille de riches norvégiens, (c’est tout comme; d’autres sont sauvés, dans le film, et bien ils sont blonds aussi!), portée disparue, dans un (pays du tiers-monde), comme disaient les européens eux-mêmes au 20 eme siècle. Voilà ce qui importe. Est-ce moral de ne pas montrer, ne serait-ce qu’une fois les « locaux » ? On les voit. Mais à la place qu’ils auraient dans n’importe quel autre blockbuster sur le même sujet. Bayona ne fait qu'y mettre une loupe, et un gros plan. Ta gueule, c’est moi qui filme. Il faut sauver la famille Johannsen, envers et contre tout. Pas de chichis, ou de méli-mélo. D’où le terme : Film catastrophe. Avec une pointe d’ironie du destin qui sourit bleu.
Renouveau du film catastrophe, tombé en désuétude depuis un moment, faute de grand sujets. Remis au goût du jour, de façon grandiose. Le mélo est induit dans ce film catastrophe. Comment ne pas ? Ce ne serait pas terrible, sinon. Les larmes n’auraient pas fait le même effet. Quand c’est aussi brillant, on ne peut, (moi en l’occurrence), que s’incliner. Et voir un tableau glacé, une esthétique hyperréaliste, séduisante, une affiche d’agence de voyages. Photogénique. Photographique. Allez en Thaïlande, malgré tout!
[La Thaïlande, située en Asie du Sud-Est, est pour beaucoup un véritable paradis terrestre. Célèbre pour ses rizières, ses éléphants, ses temples, et ses plages époustouflantes, ce pays est peuplé de gens accueillants et souriants, ce n’est pas pour rien, qu’on le surnomme le pays aux milles sourires…
Devis gratuit tél : 01 40 03 35 **]
Même après la fin du monde, Phuket reste beau. Du dolorisme, des corps meurtris, mais aucun misérabilisme chez Bayona. Le ciel est toujours d’un bleu divin. Les corps sont beaux. La violence des rapports entre survivants, est atténuée, mais montrée. Et le jeune Lucas apprend la compassion, ou non compassion. La solidarité. Le devoir. Tout ce qui fait un homme bien, ou un homme, tout court. Mélo, oui, mais assez violent quand même.
Et l’apparition du gars de la compagnie d’assurance, m’a fait décoller de mon siège. La cerise sur le gâteau. Génial épilogue ! Il a enfoncé le clou, dans la chair du sujet, Bayona. Hyper simple. Aucune histoire, juste une remontée vers la lumière. Si vous n’avez pas compris après ça, Bayona ne peut rien faire pour vous. Dès que je l’ai vu, le gars des assurances, venir et faire de courbettes, j’ai compris pourquoi les autochtones faisaient tout pour dorloter les Européens. Cela se voit clairement. Ils ne sont pas mis à la même enseigne que les autres. Comme si la vie continuait, malgré l’Enfer.
Les privilèges restent. Si les favorisés par la vie, ont en plus la chance de leur vie, ça donne un film-miracle à vie. Et chacun va rester à sa place. Celle donnée, et délimitée par sa classe, son statut. Juste. Injuste? Un tremblement de terre n’a que faire de nous, il ne fait que passer. Réalisme esthétique, et topographique. Tourbillon dantesque. Ceux qui ne sont pas contents, devront se contenter d’aller voir le dernier Disney. Génial.
Donc si vous décidez de partir en voyage au beau du monde, vous savez ce qu’il vous reste à faire. Une bonne police d’assurance, (une très bonne), s’impose. Après, il faut avoir les moyens. Mais ça, c’est une autre histoire.