Cinq après avoir annoncé qu'il arrêtait le cinéma, Luc Besson revient avec un quatrième film en tant que réalisateur. A chaque fois qu'il sort un nouveau métrage, le pire est à prévoir. Ses dernières productions, qu'il soit derrière la caméra ou au-dessus du chéquier, le confirment. Alors quand on apprend qu'il doit traiter de la vie d'Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix pour son combat contre la dictature de la Junte birmane, on ne peut que penser à ce genre de rôle de femme forte qu'aime Besson (Jeanne d'Arc, Nikita... films de qualité variante). Un tel sujet dans les mains d'un cinéaste au talent plus qu'incertain avait de quoi inquiéter mais au bout du compte, on sort d'un film loin d'être parfait, avec des longueurs, ne s'attardant pas sur les meilleurs aspects, mais en ayant mieux cerné les tourments et une partie de la vie d'une des femmes les plus extraordinaires de notre époque.
Le film s'étale sur dix ans, de 1988 à 1998, du début du combat d'Aung San Suu Kyi ( Michelle Yeoh) à la mort de son mari, Michael Aris (David Thewlis), professeur d'Histoire anglais avec qui elle eut deux enfants ; et se concentre davantage sur l'amour qui les unit, sur les sacrifices d'une femme prisonnière de la Junte birmane, au nom d'une juste cause : la liberté de tout un pays.
Le film commençait mal. En rappelant la mort du père d'Aung San Suu Kyi, général birman assassiné à cause de sa volonté de libérer son pays, et le plan suivant montrant sa fille endormie, Besson donne l'impression que dès son enfance, la Birmane devra poursuivre le travail de son père, que ce combat lui est inéluctable, que cette charge lui pèse dès le début sur les épaules. Hélas avec ce genre de procédés, le réalisateur semble vouloir transformer cette histoire vraie en pur produit cinématographique. On regrettera que le sujet, la confrontation entre deux idéologies, ne soit pas traité de manière plus approfondie. On a l'impression de regarder un film un peu trop manichéen, le combat typique du bien incarné par Aung San Suu Kyi contre le mal représenté par le général Ne Win. Le traitement de ce dernier, chef de la dictature reste trop superficiel, Besson n'en fait qu'un méchant quelconque comme on en trouve dans beaucoup de films. Un être qui ne pense qu'à lui et qui agit en fonction des prédictions d'une voyante, sans prendre lui-même de décisions.
Heureusement la particularité de ce biopic est, en plus de traiter (partiellement) d'une partie du combat du prix Nobel de la paix, qu'il s'attarde sur celui d'un couple pour être ensemble et qui s'efface pour une juste cause. Grâce à cela, même si le combat de son père hante le film, on assiste surtout au sacrifice d'un couple pour la liberté de tout un peuple. Les performances de Michelle Yeoh et de David Thewlis parviennent à rendre compte de l'implication dans ce combat de leurs personnages, sans toutefois réussir à retranscrire le poids de l'absence d'une mère et épouse au fil des années, principalement à cause des ellipses temporelles : le film n'insiste que sur les multiples retrouvailles entre Aung San Suu Kyi et sa famille, et ne se concentre pas assez sur les scènes du quotidien. Avec ces scènes de retrouvailles et la mort de Michael Aris, le metteur en scène veut insister lourdement sur le côté larmoyant de la situation, sans y parvenir, mais contre-balance cette lourdeur en proposant des plans simples à l'esthétique non surchargée et aux couleurs chatoyantes.
Malgré de nombreuses maladresses, Luc Besson livre avec The Lady un film qui pourrait ressembler à une bouée de sauvetage au milieu de ce grand bleu de productions allant du très moyen au très mauvais accumulées depuis ces quinze dernières années.