"The Master" est ma première incursion dans l'oeuvre du Paul Thomas Anderson, n'ayant eu l'occasion de voir aucun de ses autres films - dont je n'entends que du bien. Le sujet, l'accueil à la Mostra et la réputation de celui-ci me donnaient toutefois une énorme hâte de le voir, que j'ai fini par exaucer tout à l'heure.
Les premières séquences sont à couper le souffle : inventivité de tous les instants, direction artistique irréprochable, et Joaquin Phoenix qui donne tout d'emblée. Le film avance, étrange, envoûtant, porté par la musique de Johnnie Greenwood, qui par moments sonne comme du Desplats dans ses compositions les plus modernes. Qui ne connaîtrait pas à l'avance le sujet serait un peu perdu, qui le connaît se perd aussi mais se prend au jeu. Puis vientle moment où l'on commence à comprendre que le bateau que nous fait prendre le cinéaste est à l'image même de son film et de son sujet. Le bizarre et le dérangeant se fondent avec une précision plutôt réaliste et bien observée. Tous les acteurs sont impeccables et la confrontation Phoenix / Seymour Hoffmann est une grande grande idée de cinéma qui fonctionne totalement - ah ! la séquence en prison !
Seulement voilà, le tout s'essouffle vite, la grande beauté plastique perd son panache et son audace pour sombrer dans un classicisme certes peu déplaisant et bien exécuté mais décevant par rapport à l'inventivité qu'augurait l'ouverture du film. Le scénario reste toutefois remarquable, et si l'on décroche parfois (le film est un peu verbeux), Anderson sait envoyer la sauce quand il le faut et ponctuer son film, jusqu'à la fin, de curiosités affriolantes.
La déception est donc légèrement de mise devant ce qui reste un très bon film sur un sujet rarement abordé, en tout cas pas de cette manière. Rôle immense pour Joaquin Phoenix et photographie somptueuse, mais j'aurais aimé que l'audace et l'ambition ne cèdent jamais le pas à la facilité. Du bon travail cependant.