Deuxième film de Na Hong-jin, avec le même duo d'acteurs principaux que dans The chaser. On se doute que ça ne va pas être un feel-good movie, mais on fonce tête baissée.
Les deux premiers chapitres, jusqu'au fameux meurtre, sont parfaits. La discrimination des Joseon-jok, sino-coréens qui ont le choix entre une vie de merde en Chine et une vie de merde en Corée du Sud, donne une veine sociétale intense au récit. Sans temps mort, la réalisation déroule la mécanique implacable qui s'abat sur l'anti-héros Gu-nam: des dettes, une détresse amoureuse, et le voilà parti jouer sa vie contre celle d'un autre dans une ville qu'il ne connaît pas. Il est ombrageux, délaisse sa gamine, n'est pas contre supprimer un homme, mais on prend fait et cause pour lui en le voyant jouer cette dernière carte froissée face à des loups pareils à sa table. La recherche en parallèle de sa femme, partie bosser à Séoul, offre un second enjeu qui se mêle habilement au premier, empiétant sur sa concentration et les préparatifs du meurtre.
Visuellement, c'est bourré de personnalité et de plans immersifs: du rythme certes, mais sans négliger la mise en place d'une atmosphère crasseuse et anxiogène, entre économie parallèle de Yanji, lieux de flux clandestins et Séoul nocturne.
Le début de la traque fonctionne bien aussi, entre Gu-nam en fuite qui n'a plus rien à perdre et qui doit réadapter sa stratégie en temps réel, un mystérieux ami de la victime qui lance ses sbires à ses trousses, et le commanditaire du meurtre qui vient rajouter son style de barbare décontracté dans l'équation. Le rythme devient frénétique et aligne les scènes chocs, mais finit par les rendre répétitives et peu crédibles. Le propos se dilue dans tout ce sang, et perd aussi de sa dimension humaine. On reste dedans parce que les deux acteurs principaux incarnent leur personnage avec force, et la violence crue typique du cinéma coréen garde quelque chose de jubilatoire (il faudra enquêter sur ce fétichisme national pour les marteaux et les haches), mais Na Hong-jin aurait gagné à emprunter une de ces lames, couper la bobine, et ramener le film de 2h20 à 2h.
Conlusion, The murderer offre un contexte social plus affirmé et un anti-héros plus touchant dans ses motivations, mais je trouve The chaser un peu mieux maîtrisé dans son récit, mieux équilibré entre ses moments nerveux et ses moments d'accalmie.