Rachel,jeune femme idéaliste et cosmopolite aux vagues origines juives,est recrutée par le Mossad qui lui confie une mission importante en Iran.Découvrant le monde impitoyable de l'espionnage et les conséquences dramatiques que peuvent avoir ses actes,ses certitudes commencent à vaciller.Le réalisateur et scénariste israélien Yuval Adler adapte ici "The English teacher",un roman de Yiftach Reicher Atir.Cette coprod germano-franco-israélienne qui fut présentée hors-compétition au Festival de Berlin s'inscrit dans la veine du film d'espionnage réaliste aux accents documentaires.On est loin des cabrioles de James Bond ou Jason Bourne,l'histoire nous plongeant dans le quotidien d'une femme déterminée devant s'infiltrer dans la société iranienne sous l'identité d'une prof d'anglais bien ordinaire.L'objectif est d'approcher Farhad,patron d'une société d'électronique en lien avec l'industrie nucléaire,afin de repérer les scientifiques impliqués dans le programme et de les éliminer.Mais il y a le facteur humain qui peut toujours contrarier les plans froidement élaborés et perturber les organisations les mieux rodées.Là c'est l'amour qui s'invite inopinément car la fille est jolie et sa relation avec sa cible,utilitaire au départ,prend une tournure incontrôlable,d'autant plus que Thomas,l'officier traitant de Rachel,n'est pas insensible aux charmes de la belle.Adler semble faire partie de la gauche progressiste israélienne car la peinture pour le moins négative qu'il fait des méthodes des services secrets de son pays est sans complaisance,décrivant une bande d'assassins déshumanisés ne valant guère mieux que les terroristes qu'ils combattent et pour qui la fin justifie les moyens,même les pires,du moment qu'on est persuadé de lutter pour une noble cause.Le film est tendu à bloc et manie adroitement les figures imposées des histoires de Guerre Froide.L'héroïne est constamment sous pression,le danger,le stress puis progressivement la mauvaise conscience l'enserrant en permanence,et elle devra se salir les mains et l'esprit pour survivre et faire ce qu'on attend d'elle.Elle finira par comprendre qu'elle n'est qu'un pion interchangeable au milieu d'un jeu aux buts plus obscurs et aléatoires qu'elle ne le croyait.Diane Kruger,pâle et minérale,voit son impassibilité coutumière correspondre idéalement à ce personnage fluctuant dont l'identité doit s'effacer derrière l'oeuvre à accomplir.Martin Freeman,en agent dur qui succombe à ses sentiments inappropriés,est parfait comme il l'est généralement,et Cas Anvar est excellent en play-boy oriental,jeune entrepreneur ambitieux qui va passer de la décontraction flamboyante à la chute du paria manipulé et défait.La description de l'Iran moderne est inattendue,avec cette société corsetée mais où l'on peut tout faire du moment que ça ne se voit pas et que ça reste dans le domaine privé.Dommage que le film se termine de manière abrupte et énigmatique.