Très dans l'air du temps.
Un western désacralisé, quand le héros, violent, plutôt anti- héros, est un cow-boy qui à fait Yale (et qui le garde bien pour lui) , occupe la quasi- totalité des plans.
Bien sûr, on voit aussi des vaches et de la poussière.
Beaux plans. Beaux paysages. Ça, Jane Campion sait faire.
Nature qui montre sans montrer, quand on lit les formes des collines et des montagnes, et qu'on voit un chien, la gueule ouverte.
Les personnages font simplement partie de décor. Décor qui est en train de disparaître, comme disparaît la conquête de l'Ouest dans les "roaring twenties".
Les hommes sont des rustres, conformément au cliché du vacher de l'Ouest américain.
Les femmes, enlaidies à souhait, même C .Dunst, sont affublées de vices - alcoolisme ou claudication.
Quant à Phil -"ami" en grec - il est une enveloppe crasseuse qui cache bien profond (écharpe qu'il sort de sa culotte pour s'en caresser) une initiation traumatisante, qui lui fait adorer la selle transmise par celui qui l'a appris à "monter", disparu, donc idolâtré, et haïr l 'humanité. Seul, dans la pénombre de l'écurie, il la cire longuement, ou plutôt, il la masse à pleines mains, il la caresse , et le plan n'en finit pas.
(Fausses caresses, pour la mère de Peter, limitées aux gants de peau offerts par les indiens, à qui elle a donné les cuirs tannés destinés à être brûlés. Seul acte d'amour du film.)
Transmission qu'il va s'ingénier à inculquer à Peter , efféminé , moqué, et solitaire, fils de la femme de son frère, qui cherche à percer le secret de la vie en disséquant des animaux.
Transmission réussie, sous la forme d'un lasso qu'il a tressé, qu'il lui lègue - cordon ombilical - à sa mort précoce.
Film sombre, acteurs utilisés comme des ombres, et en oraison funèbre, la page du Psaume 22 :
"Délivre mon âme de l'épée , et ma vie du pouvoir du chien." Au sens biblique, pouvoir de l'impur, du méchant, du violent. Vision noire d'un monde en décomposition : notre époque ?