Entre sa production apocalyptique et ses ambitions d’Oscars, on en viendrait presque à oublier qu’avant d’être la nouvelle affiche de DiCaprio ayant frôlé l’accident industriel, The Revenant n’est qu’un film. Porté par la démesure égocentrique de son metteur en scène, par la multiplication des défis techniques qu’il s’est lancé et par la teneur mythologique de son récit, le dernier Iñarritu a su déchaîner les passions – en bien comme en mal. Plus que de choisir un camp, il s’agira ici de rendre hommage à l’artiste, plus qu’au conteur.


Dans cette jungle glaciale et sauvage, l’Homme n’est pas à sa place. Pour survivre aux flèches et aux ours, il revêtit son costume en peaux, revenant à ses plus bas instincts, à sa forme animale originelle, comme un superhéros préhistorique. On suit une vengeance, un périple long de près de trois heures sur fond de religion, de génocide de bestialité – mais au final, The Revenant est davantage une expérience sensorielle plutôt que l’odyssée mystique qu’il souhaiterait être. Pas qu’Iñarritu ne sache pas illustrer et donner une sémantique à ses images – mais ce prétexte n’est guère intéressant et gangrène finalement la vraie aventure, le véritable enfer, le seul et unique poème de The Revenant : sa mise en scène.
D’une maestria technique invraisemblable, il est difficile d’y trouver une chose à redire. De la direction d’acteurs impeccable à la sublime photographie, de l’audace de chaque parti-pris au cadrage tarkovskien obsédant, de la bande-originale atmosphérique à la majesté des décors. Lorsque la violence physique de ses protagonistes se transforme en violence psychologique pour le spectateur, The Revenant a déjà gagné la partie. Son amour de l’hors-normes et sa passion du relief parachèvent de lui conférer ce charme singulier d’un cinéaste en quête d’eldorado.


Finalement, l’histoire est simple, les personnages aussi – la première est parfaitement racontée, les seconds sont interprétés par des acteurs irréprochables. Une critique qui revient souvent vis-à-vis de The Revenant, c’est qu’il n’a rien à relater – pourtant Iñarritu n’aurait eu aucun intérêt à complexifier davantage sa trame principale ; non, la vraie faille de son film, c’est qu’à vouloir tout relier, tout justifier, le réalisateur tente de donner un sens à ce qui n’en as pas. La survie dans ce qu’elle a de plus sauvage n’a rien de dégradant en tant qu’idée de cinéma, il aurait mieux fait de s’y tenir.

Vivienn
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le 28 févr. 2016

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