Mouais.

Quand comme moi on s'intéresse au cinéma de genre et à l'horreur dans toute sa diversité, même les petits films modestes voire les séries Z peuvent être intéressants. On a toujours quelque chose à tirer même de films d'horreur médiocres.

Bryan Bertino, c'est un de ces petits réalisateurs d'horreur comme on en croise des tonnes depuis 15 ans : Il n'est ni un génie ni un tâcheron, ce qu'il fait, il le fait bien mais sans éclat particulier.

J'avais bien apprécié son premier film The Monsters, fable sur la toxicité maternelle bien menée, et j'étais resté sceptique devant The Dark and the Wicked, qui voulait conjuguer un film de démons avec un récit sur le deuil pour un résultat pas inintéressant mais sans vraies fulgurances.

Un réalisateur capable donc de produire de la bonne péloche, et qui même quand il se plante arrive à capter notre attention.

Avec The Strangers, on se trouve pile poil au centre de cette zone grise dont je parlais. C'est un film d'horreur aussi sympathique qu'horripilant, aussi tendu que timide, aussi Liv Tyler que Scott Speedman.

Car oui disons-le, voir notre Arwen adorée dans un film d'horreur, c'est pas mal intriguant. Mais elle aurait sans doute préféré être seule qu'aussi mal accompagnée avec Micheal Corvin d'Underworld. Ah ça, on sait pourquoi c'est Kate Beckinsale la tête d'affiche dans cette saga-là !

Méchanceté gratuite mais justifiée mise à part, Liv Tyler est la vraie (seule ?) bonne raison de voir ce film. C'est une authentique Scream queen, son rôle n'est littéralement qu'une succession de cris de terreur et de regards horrifiés, mais elle le tient parfaitement de bout en bout, avec en plus une gradation dans la façon dont elle jouer ses scènes de peur. Bon, l'idéal aurait quand même été de lui écrire un rôle plus consistant vu que c'est censé être basiquement une final girl dans un Slasher... A moins que ?...

Parce que bon, on peut dire tout le bien qu'on veut de l’Étoile du Soir, si elle n'éclaire rien d'autre qu'une soirée sans sono ni alcool, c'est quand même un peu triste. The Strangers nous annonce dès son ouverture qu'il s'inspire d'un fait divers, avec un montage rappelant une arrivée sur une scène de crime prise sur le vif et un faux appel d'urgence. Donc on devrait en principe être dans un métrage recherchant un certain réalisme. La suite nous donne presque raison puisqu'on découvre notre couple en (non-)devenir quasiment en temps réel, sans musique et avec un éclairage sobre. Promesse tenue 15min puis débarquent les méchants, et là ça ne marche plus.

Vous connaissez Halloween ? Le bon, celui qui a été fait il y a 40 ans. Dans celui-ci, Micheal Myers est moins un tueur en série humain et terre-à-terre qu'une sorte de présence, une créature de l'ombre qui se déplace sans que la caméra ne semble pouvoir le suivre et qui frappe en forçant son arrivée dans le champs. Le trio de psychopathes de The Strangers suit exactement le même principe à la lettre, il en fait même le motif principal de sa mise en scène horrifique. Et autant quand ça n'est que le début et qu'on ne fait que nous suggérer leur présence autour de la maison ça va, mais quand par la suite ils se mettent à pourchasser et tourmenter nos héros en paraissant être partout à la fois tels des spectres, ça coince parce qu'on n'est plus du tout dans le même registre. On est dans un film de faits divers avec des antagonistes de Slasher, littéralement Chiens de Paille avec Micheal Myers. Une alchimie qui serait intéressante si elle se traduisait en un véritable travail horrifique, mais malheureusement Bryan Bertino ne sait pas quoi en faire. Bloqué entre le réalisme et le pur film d'horreur, il se contente de faire de son film une succession de scènes à suspense. Scènes pas mauvaises au demeurant, mais systématiquement conclues par des jumpscares, et en plus des jumpscares de 2008, donc encore plus faciles à griller des secondes à l'avance. En fait tout ce travail de la tension serait parfait s'il servait un crescendo et un final paroxystique qui se lâche complètement, mais même pas. On nous travaille pendant 1h30 des antagonistes quasi-surnaturels, et lorsqu'enfin ils se dévoilent à nous lors du climax... Bah ils font pas grand chose. Donc en plus d'être lent et peu palpitant ça déçoit.

The Strangers aurait mérité de trouver le ton juste. En étant un pur Slasher, il aurait été plus généreux en termes de violence et nous aurait donné une satisfaction plus primaire mais plus immédiate; en étant un pur film de faits divers, il aurait gagné une brutalité et une âpreté qui l'auraient rendu saisissant. Bertino n'a pas su choisir et se retrouve à nous livrer un film mouais.

Pas un mauvais film du tout, hein. Moi je reprends bien 3h de plus d'Arwen qui crie en tirant ses rideaux. Mais un film tiède, ni bon ni mauvais, coincé dans un entre-deux gênant où se côtoient le meilleur et le pire du cinéma de genre.

Le mouais de l'horreur, insatisfaisant mais pas désagréable.