un "presque" chef d'oeuvre

Sans cette fin volontairement ultra gore où Coralie Fargeat déverse rageusement l'hémoglobine au tuyau d'arrosage, ce film serait à placer parmi les réalisations les plus marquantes de ces dernières années. L'idée de base est fantastique (dans les deux sens du terme), la mise en scène nerveuse est irréprochable (elle fait un peu penser à celle de Anora) et la prestation des acteurs et actrices est splendide. On est en apnée durant près de deux heures devant cette dénonciation au vitriol d'un monde sexiste et vulgaire dont le représentant le plus emblématique, le producteur veule et machiste admirablement interprété par Dennis Quaid, pourrait faire penser à un autre Américain qui vient de gagner à nouveau au loto. L'alternance entre les deux femmes qui ne font qu'une, magistrales Demi Moore et Magaret Qualley, est LA force du scénario (récompensé à Cannes) et indique qu'on aurait affaire là à un chef d’œuvre du genre. Mais voilà, ça se gâte pour les dernières vingt minutes où le conditionnel s'impose concernant le mot "chef d’œuvre".

Comment peut-on pondre une histoire aussi captivante et flinguer sa crédibilité avec une fin d'immense n'importe quoi ? Autant le genre gore des deux premières heures (environ) est habilement maîtrisé, autant celui grand guignolesque de l'épilogue (monstre plus risible qu'effrayant, arrosage sanguin du public - Carrie en référence évidemment - et morceaux de bidoche sur l'étoile de Sunset Boulevard) laisse à penser que, malheureusement, Coralie Fargeat n'a pas su comment boucler son film.

Cette réserve mis à part, il faut voir ce brûlot féministe pour sa quasi entièreté qui est vraiment un coup de poing dans l'estomac. Et avoir le courage de sortir quand ça dérape ?...