Elle en pire
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The Substance, deuxième long métrage de la réalisatrice française Coralie Fargeat après Revenge en 2018, explore les tumultes du corps luttant contre son vieillissement naturel et contre l’animosité sociale provoquée par le « désagrément de l’organisme féminin ».
Avec une mise en scène digne du cinéma des années 80 et des années 2000 (The Shinning en tête de liste mais également Requiem for a dream), Caroline Fargeat plonge son spectateur de manière brutale et assumée dans un univers marqué et ponctué de repères, qu'elle filme en très (très) gros plans et bourre de bruitages excentriques, et le prend par le bras pour foncer avec lui tête baissée vers le plus en plus trash, le plus en plus fou, le plus en plus délirant. Pas de dialogue, pas de mise en contexte, pas d'environnement social. L'ambiance du film devient de plus en plus opréssante à mesure que l’intrigue progresse, installant un stress grandissant jusqu’à un point culminant de tension. Cette montée dramatique est maîtrisée, et le réalisme des émotions transmises est tout simplement impressionnant.
Malheureusement le film trébuche au moment de conclure. Poussant l'intensité tragique à son paroxisme, cette fin donne l’impression d’en faire trop, alourdissant une œuvre qui aurait pu s’achever sur une note plus subtile.
Mais la véritable critique que je ferai à The substance est son scénario (assez ironique alors qu'il a remporté le prix du meilleur scénario au Festival de Cannes 2024). En effet, la substance elle même semble éclipser le film, qui manque véritablement en profondeur. Le film privilégie le divertissement, emballant ses idées profondes dans un extérieur brillant avec un gros budget, des acteurs renommés livrant des performances solides et des effets spéciaux impressionnants. Pourtant, il offre peu de matière pour une réflexion critique, restant largement superficiel et évitant une exploration plus profonde de ses thèmes. Avec une durée de 2 heures et 20 minutes, il semble inutilement long, étirant son contenu minimal pour remplir le temps.
Si la charismatique et cinégénique Margaret Qualley ne démérite absolument pas dans le rôle de Sue, Deni Moore est parfaite en Elisabeth Sparkle, artificiel et plastique. Elle nous livre ses formes en image, face à ce miroir, autre personnage principal de ce film, qui symbolisent à la fois la réflexion, la confrontation, et bientôt la destruction, lorsque la haine surgit.
Le deuxième gros souci du film, c'est le manque total d'humanité. Le film ne fait exister qu'un seul être, double, qui est de tous les plans (parfois même deux fois...), et qui n'a aucune relation amicale, familiale ou ne serait-ce que "normale" avec autrui, au point que tous les autres êtres qui apparaissent dans le film (quasi uniquement des hommes) ne sont que des caricatures, des concepts, au premier rang desquels, l'affreux producteur de télévision, totalement unidimensionnel, uniquement motivé par l'argent. Mais au fond, même Elisabeth/Sue n'est pas un personnage : elle n'a pas de sentiments, pas de profondeur, elle n'est qu'une pulsion - retrouver son apparence juvénile - et tout ce qui est humain lui est étranger.
Ainsi, malgré des scènes marquantes et une esthétique affirmée, The Substance peine à satisfaire pleinement les attentes. Le film, s'il est indéniablement intéressant et visuellement marquant, aurait bénéficié d'une approche plus mesurée, laissant davantage de place à l'interprétation et à la subtilité. Il constituera selon moi définitivement un objet VISUEL non identifié mais restera une frustration face à un potentiel qui n'a pas été pleinement réalisé.
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