La Chose du Désert de Glace
J'avais toujours entendu de belles choses sur La Chose. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque, dès le générique d'introduction, je vois apparaitre "Kurt Russel", puis... "Music by Ennio Morricone"... A ce moment-là, je ne sais pas pourquoi, mais je me suis dit que The Thing, je n'allais sûrement pas regretter de l'avoir lancé. Ici, les -mauvaises- longueurs sont inconnues pour Carpenter. D'emblée, il nous plonge dans une atmosphère frigorifiante dont l'Antarctique était le théâtre parfait, balayée par les vents glacials et inondés d'une blancheur aussi splendide qu'impitoyable. D'autres s'y sont essayé plus tard, comme le fantastique Alien vs Predator (fantastique dans le sens du genre cinématographique). Hélas, n'est pas Carpenter qui veut, même s'il a aussi, comme tous, réalisé des films très décevants, pour ne pas dire "navets". La musique de Morricone dévoile tout son génie ici, d'autant plus que je venais de revoir Et Pour Quelques Dollars De Plus, et franchement le changement est décapant, c'est le moins que l'on puisse dire !
Ainsi donc Morricone nous plonge dans l'ambiance dès les premières secondes, et la réalisation de Mister John est bluffante du début à la fin. Certains plans maintiennent le suspense avec quelques prises de vue furtives, des plus "longue durée" de paysages ou de certaines situations respectent parfaitement l'esprit de celles-ci, comme lorsqu'il insiste sur le paysage glaciaire, sévèrement brossé par les vents terribles, dans lequel nos scientifiques s'ennuient à mourir. A mourir, justement, c'est bien le terme qui convient... La mort et la vie s'expriment pleinement et se contredisent jusqu'à la toute dernière image du film, nous rappelant qu'elles ne pourront jamais être indissociables. Etrangement, la vision de ce film nous force à nous interroger sur les réactions de l'Homme face à l'inconnu, sa nature suspicieuse et traitre, ou honorable et impitoyable, lorsque sa survie est en jeu.
Des scientifiques américains vivent, isolés du monde civilisé, au coeur d'une nature barbare et indomptable. Ils s'ennuient, conversent, s'occupent comme nous le ferions tous : en jouant, en s'engueulant, en discutant, ou en dormant, lorsqu'ils n'ont rien de mieux à faire. Puis, un chien accourt, poursuivi par un hélicoptère norvégien. Le chien est sauvé, pas les norvégiens. Fin de la présentation, l'aventure commence. A mon grand étonnement, The Thing est plus "gore" (au sens premier du terme, bien éloigné des films "gore" d'aujourd'hui) que je ne l'imaginais. Plus violent et plus profond, et paradoxalement plus posé et plus réfléchi aussi. Ainsi, Carpenter dépeint une palette bien spécifique des sentiments et des réactions de l'Homme, que je ne détaillerai pas dans cette critique afin d'éviter de priver de l'effet de surprise, s'il en est, les éventuels lecteurs qui n'auraient pas encore (Oui, c'est ça, cachez-vous bien !) eu la chance de voir.
En tout cas, en cette année 2012, The Thing fête son anniversaire : 30 ans déjà, et pas une seule ride ! Quand d'autres s'essayent à la chirurgie esthétique pour se rajeunir en parvenant seulement à s'enlaidir, The Thing conserve un charme "naturel" et "old school" qui ne peut que plaire, surtout lorsqu'on jette un regard attentif sur les productions d'épouvante / S-F de ces 15 dernières années. En regardant The Thing, on s'interroge, on se tient en haleine, on se fait surprendre, on sursaute, parfois, on sourit, également, et on tremble, de temps en temps. Une certaine magie se dégage irrémédiablement, et comme certaines critiques l'ont parfaitement souligné, The Thing est comme ces vins étonnants et uniques qui n'ont de cesse de se bonifier avec le temps.