Fier du succès engendré par sa série The Witcher, et afin de faire patienter les fans jusqu'à la prochaine saison 2, Netflix s'est permis la production d'un petit film d'animation dans l'univers de Andrzej Sapkowski, contant cette fois-ci non pas une aventure de notre Geralt de Riv préféré mais de Vesemir, mentor de ce dernier ; de quoi prouver une fois de plus la volonté de faire, avec de nombreux autres univers (de Fantasy), des tas de spin of.
Passé ma subjective réticence face à ce genre de projets et ce malgré une attente incontrôlable concernant la série Le Seigneur des Anneaux de Amazon, revenons à ce film d'animation qui ne dure guère plus qu'un film à petit budget (ce qui, généralement, est une mauvaise nouvelle concernant la qualité de l’œuvre, même si les contre-exemples existent) mais qui dispose de quelques outils intéressants.
Nous sommes donc plongés dans le passé au côté de Vesemir qui doit s'allier à une sorcière pour attraper une créature capable de faire germer des hallucinations dans l'esprit de ses victimes alors que les Sorceleurs sont de plus en plus mal vus.
Pas plus de spoil !
Pour commencer, et pour rappel, malgré ma passion pour la Fantasy, je ne connais que très peu le lore de l'univers The Witcher et suis donc dans l'incapacité de dire si oui ou non cette création respecte quoi que ce soit. Surtout que l'on visite le passé, certes indirect, du Loup blanc donc... De ce fait, si dans le fond, je n'ai guère les connaissances pour approuver ce qu'il se joue devant mes yeux, force est de constater que dans la forme, nous sommes magistralement bien servis et l'histoire en est pour quelque chose. Dès les premières minutes, on nous montre que ce film d'animation ne va pas se censurer et, par cette liberté d'expression, nous montrer l'univers froid et sombre que l'on a retrouvé dans la série de 2020 ou que l'on a côtoyé dans les jeux vidéos. Pour faire simple : les enfants prennent énormément cher que ça en devient presque immonde. On n'hésite pas à faire saigner nos chers têtes blondes et mine de rien, cela ajoute à la dureté de l'univers et offre une véritable réalité glaçante concernant les apprentis sorceleurs. De ce point de vue là, même si on peut tout de même pointer une forme d'exagération, c'est une claque sanglante et hypnotique que l'on reçoit. Et si la claque est plutôt "positive", on en reçoit d'autres qui le sont moins... Concrètement, si le scénario est assez captivant, sa construction, bien qu'originale est assez déconstruite, alternant entre des passages présents avec un Vesemir adulte et des séquences de son entrainement passé. En un sens, le film d'animation a voulu opter pour la même construction scénaristique que la série précédente : une intrigue à la continuité spacio-temporelle abstraite mais qui soit capable de faire émerger des émotions bien concrètes. Sauf que, si la série s'en sortait relativement bien, ce n'est pas vraiment le cas du film d'animation, notamment à cause de ses 1h23 de divertissement : c'est horriblement court pour commencer à faire ce genre de circuit certes épatant mais qui prend énormément de ressources et de concentration aux spectateurs.
Mais hormis ces petits problèmes, force est de constater que l'histoire est... sympathique mais sans plus. En effet, on demeure quand même sur un temps de diffusion très court et la moindre "erreur", le moindre défaut dans le récit se voit et surtout se retient. On est certes transporté dans le monde difficile et cruel des sorceleurs, on observe quelques enjeux politiques mais dans l'ensemble, c'est assez bancal sans pour autant être totalement détestable.
Pour ce qui est des personnages, on va avoir quelques redites, notamment avec la fameuse continuité (spacio-)temporelle. En effet, on va zigzaguer fréquemment entre passé et présent, et pour la construction de personnage, ce n'est pas forcément ce qu'il y a de mieux, excepté si c'est bien fait. Sauf que là, ce n'est pas que c'est mal fait, c'est qu'une fois de plus, on a pas le temps. Alors il faut choisir des séquences importantes à montrer et mélanger comme ça l'est, cela rend juste le résultat désolant. On arrive assez bien à discerner et à apprécier la personnalité des différents protagonistes, mais sur des séquences de quelques minutes, les changements d'époque rendant l'évolution des mœurs, comportements... quelque peu incompréhensible.
Pour ce qui est des personnages dans un objectif plus focalisé, on se rend compte rapidement que seul deux/trois personnages sont véritablement détaillés, et de manière beaucoup trop rapide encore une fois, ce qui laisse des personnages secondaires déambuler sans que l'on sache pourquoi et qui agissent sans que l'on comprenne réellement l'impact que cela aura (sauf si le tout est expliqué dans les livres ou jeux vidéos mieux exploités de la franchise). En ce qui concerne le personnage principal qu'est Vesemir, on a l'impression - pas forcément négative - de suivre un Gavin ; héros de la saga Le Porteur de Lumière (seul exemple qui me vient à l'esprit ; un sorceleur qui connait ces capacités ainsi que ces qualités et qui en joue) dont la gestuelle durant les séquences plutôt calmes ne seront pas sans rappeler un autre sorceleur célèbre, si vous voyez ce que je veux dire ! Au point où cela devient presque ennuyant... Et en réalité, à part Vesemir (et un peu les deux seules femmes du film), côté personnage, c'est un peu le vide, ce qui accentue cet effet dommage.
Pour la qualité graphique, rien qu'exceptionnel à déclarer : nous sommes en face d'une production qui a du potentiel avec des animations sympathiques, le tout dans un ensemble assez joli à observer mais voilà, le petit défaut, ce que cela fait peut-être un peu trop banal... On aurait très bien pu imaginer une direction artistique plus sombre, plus originale que du... Netflix, typiquement. Parce qu'en vrai, la qualité graphique de cette série peut être rapprochée sans effort de la série Le Prince des Dragons ou de la série DOTA : Dragon's Blood, à croire que Netflix ne cherche pas à proposer de vision atypique dans l'imagerie utilisée. Néanmoins, elle demeure agréable en étant banale, ce qui est déjà pas mal. Mention spéciale pour la (trop) courte séquence d'introduction qui nous montre un semblant de pendentif de sorceleur.
Pour les combats, force est de constater que c'est bien gore, notamment quand on se souvient que les principales victimes sont des enfants. La plupart des affrontements sont dynamiques, avec de jolies manœuvres et des stratégies de chasse à la créature ingénieuses. Une mention spéciale pour le combat final qui retourne le cerveau tellement il est bien pensé et bien amené. Concrètement, ce point est peut-être l'un des mieux réussis.
Pour les décors et les paysages, on reste sur quelque chose de basique mais qui, marié avec la beauté simpliste des graphismes, demeure agréable à regarder, sans pour autant transcender, sauf exception d'une séquence ou deux, également enjolivées par une bande son de mise...
Et en parlant de musique, il faut avouer que l'on est en compagnie d'un soundtrack tout à fait plaisant, avec ses inspirations dans les thèmes du troisième jeu qui parviennent à faire sans aucun problème le café.
The Witcher : Le Cauchemar du loup n'est pas entièrement mauvais mais pour une création Netflix, ça choque un petit peu tout de même... Quel était le but ? Véritablement offrir une vision du passé du mentor de Geralt de Riv ou bien proposer un apéritif en attendant la sortie de la saison 2 de la série de 2020 ? Fort à parier que la deuxième proposition soit la bonne, malheureusement. En bref, le film d'animation est trop court pour que l'on s'attache à l'histoire, aux personnages, à l'action... à quoi que ce soit malgré des efforts déployés dans quelques points. Et c'est dommage lorsque l'on sait de quoi est capable Netflix (avant de pourrir les suites généralement) mais à être radin sur la durée du film, il ne faut pas s'étonner que les appréciations ne soient pas au rendez-vous. Une création qui sera surtout un cadeau pour les passionnés incontestés de l'univers The Witcher et qui ne fera office que de divertissement intéressant pour les autres, de quoi se demander si la conception d'un tel film était rentable ou pas...
Et n'oubliez pas que la Fantasy nous appartient !