Thomas,un trentenaire agoraphobe,n'est pas sorti de son appartement depuis huit ans,et il n'y reçoit personne .Tout ce dont il a besoin lui est fourni par une société d'assurances chez qui il a souscrit un contrat.Il passe sa vie devant son ordinateur équipé d'un visiophone,l'ancêtre de Skype,ce qui lui permet de communiquer avec le monde extérieur.Son existence est rythmée par ces rencontres virtuelles avec sa mère,son psy,son assureur et des femmes avec lesquelles il pratique le cybersexe.Pierre-Paul Renders,pour son premier long-métrage,a adopté un dispositif original et risqué qui porte cette production belge futuriste.On entend Thomas mais on ne le verra jamais puisque nous sommes à sa place et ne voyons que ce que lui voit sur son ordi.Le film est donc une suite de plans fixes sur les interlocuteurs du jeune homme.C'est gonflé mais ça fonctionne bien car on est vite immergé dans cette curieuse vie végétative.Les personnages sont assez fouillés et les dialogues suffisamment intelligents et bien écrits pour capter et maintenir l'attention.Les rapports des uns et des autres avec Thomas finissent par éclairer la psychologie perturbée du garçon et dessinent une histoire à la fois drôle et terrifiante qui devient ensuite émouvante.Car le réalisateur ne se contente pas de nous décrire un cas particulier de maladie mentale et le propos est plus général.En fait,Thomas constitue le degré ultime de l'évolution de l'homme moderne modifié par la technologie.Renders semble fasciné par les mutations humaines,mutations physiques dans son court-métrage "La tendresse",mutations mentales ici.Le héros est au fond parvenu au dernier stade d'inféodation à ces moyens de communication virtuels qui aboutissent à tuer la communication réelle.Plus besoin de sortir de chez soi,plus besoin de vraiment rencontrer les gens,plus besoin de séduire des femmes,puisque tout peut se faire en restant à la maison,à travers le prisme de l'écran d'ordinateur.On constate que le film,datant de 2001,est carrément prophétique et anticipe une dangereuse évolution de la société vers l'abstraction et la déshumanisation.Il est servi par une bande d'acteurs inconnus mais excellents d'où ressort Benoît Verhaert,constamment invisible et qui parvient à faire exister son personnage par l'unique biais de sa voix.