La promesse de la clôture sans déception du triptyque Asgardien semblait être facilement tenable au vu des deux premiers volets pas totalement convaincants de la saga. La volonté de délivrer un buddy movie comique semblait, elle, un peu plus risquée. Finalement, on retiendra de Thor : Ragnarok seulement ce pour quoi il a été réalisé : une comédie d'action fun limitée par ses ambitions. Car porter dans son titre Ragnarök sans apporter d'éléments dramatiques inhérents à l'histoire, c'est un peu dommage. Mais ce nouvel opus ne souhaite pas seulement voir du côté de l'apocalypse asgardien mais aussi aller puiser dans l'un des comic books des années 2000 qui a le plus séduit les lecteurs : Planet Hulk. Pari risqué mais tenu ou pari impossible et mal foutu ?


La déception est là, quand le rideau se lève et qu'on se rend compte que finalement, Thor : Ragnarok, c'était du too much pour pas grand chose. Surfant sur la vague de popularité des Gardiens de la Galaxie et bénéficiant de la nouvelle stratégie marketing du MCU d'exploser la rétine du spectateur avec une esthétique colorée à outrance, la nouvelle épopée nordique se veut une pure comédie d'action. Pas forcément un problème, puisque le côté buddy movie remplit à merveille les codes de ce genre. Mais le problème principal inhérent au métrage se cache dans son scénario, ou devrais-je dire, dans son absence de scénario. Ragnarok se fiche pas mal des éléments dramatiques ou logiques, et se contente de superposer des scènes comiques ou épiques sans pour autant en donner les enjeux. Pire, quand ces derniers apparaissent, ils finissent toujours par se volatiliser d'une manière ridicule, un peu comme la danse finale de Star Lord face à Ronan, un moment gênant plus qu'amusant qui hélas n'est pas prêt de s'évaporer des esprits. Ainsi, le 17ème film du Marvel Cinematic Universe peut être à juste titre considéré comme l'un des plus violents et tragiques métrages des studios, mais pourtant jamais les enjeux ou les scènes fortes ne se font ressentir, ce qui est hautement préjudiciable au film.


Cette année 2017 aura été pour le MCU une année fortement nouvelle et inauguratrice, peut être, d'une nouvelle ère. Car les trois films sortis sont tous les trois des comédies d'action plus que des blockbusters comiques que désignaient la majeure partie des films de l'univers étendu. Marvel Studios semble assumer pleinement sa volonté de faire dans la comédie, sauf que ça ne marche pas forcément toujours bien. Là où Les Gardiens de la Galaxie Vol. 2 trouvait assez de place pour forger de la tension et des émotions à travers une équipe touchante, et là où Spider-Man : Homecoming trouvait sa force dans son style teen movie réussi, Thor : Ragnarok n'arrive pas à trouver son binôme. C'est simplement une comédie, qui essaie d'être un peu touchante, mais qui n'y arrive pas volontairement parce qu'elle est toujours rattrapée par son humour. Et comme souvent dans les films Marvel, c'est un humour qui fonctionne une fois sur quatre, des punchlines qui font parfois sourire mais qui n'atteignent jamais le statut qu'on accorderait à une vraie comédie.


Toutefois, tout n'est pas un échec, et c'est assez plaisant de voir que les personnages évoluent réellement, que des décisions sont prises et que Thor et Hulk forment un duo qui marche du tonnerre. S'ajoute à cela la réelle impression que Waititi a compris qui est réellement Thor et quels sont ses pouvoirs. Difficile pour un fan de ne pas sauter de joie à la vue de la séquence d'introduction qui promettait beaucoup en étant la plus réussie et la plus sauvage des films Marvel. Impossible de ne pas adorer les séquences d'action, très nombreuses, qui montrent une lisibilité agréable et une belle maîtrise cinématographique. D'un point de vue artistique global, le réalisateur néo zélandais fournit un joli travail. Malgré quelques effets spéciaux ratés (notamment les décors qui sonnent vraiment faux) et des choix artistiques surprenants (costumes), l'esthétique globale tendant vers un retour aux folies des 80's et à la dimension mystique des graphismes de Jack Kirby (récompensée d'un Disney Legend cette année) est réussie, bien plus que celle grise et terne à laquelle nous sommes habitués depuis quelques années pour le genre super héroïque depuis The Dark Knight. En soit, la réalisation parvient à divertir et à être suffisamment efficace pour ne pas voir le temps passé malgré les lacunes scénaristiques. Et c'est cela qu'il faut reconnaître à Thor : Ragnarok : en terme de divertissement pop corn, le métrage atteint des sommets. Sauf que pour un 17ème film d'un univers étendu, on est en droit d'attendre quelque chose de plus pointilleux, de plus habile dans la construction de son récit, au lieu de répéter inlassablement les mêmes erreurs qui autrefois n'avaient pas forcément d'importance mais qui se trouvent ici aggravées. Caster Cate Blanchett pour un rôle de super méchante, c'est classe. Mais c'est comme utiliser Mads Mikkelsen sans lui donner un bon rôle : c'est vain. Parce que Cate Blanchett se donne à fond, et ça se voie. Mais Marvel ne lui offre qu'un petit rôle d'une méchante, importante sur le papier, mais totalement balayée au fil du film. Une méchante qui aurait pu avoir des motivations logiques mais qui au lieu de ça semble s'évertuer à enchaîner les actions insignifiantes qu'on confierait à un Malekith.


"Fun". Le mot à la mode pour décrire les films Marvel, mot employé partout tout le temps, à tel point qu'il ne veut plus rien dire. Thor : Ragnarok est donc fun. Peut être parce qu'il est brillamment divertissant; peut être parce qu'il est rythmé. Peut être parce que ses personnages sont comiques.


Thor : Ragnarok est d'une frustration terrible parce qu'il aborde des thèmes qui auraient pu, et dû, être sombres. Pour la première fois depuis 4 apparitions dans le MCU, Thor trouve une force et des pouvoirs qui lui sont propres, et un souffle de mythologie nordique s'abat réellement. Taika Waititi met son talent au service d'une esthétique étrange mais saisissante et d'une musique aux airs des eighties. Mais ça ne marche pas, ou peu. Le film s'évertue à paraître comique, à enchaîner les blagues et à descendre tout instant dramatique. Et si le futur du MCU copie cette année de comédies d'action qui ont explosé le box office, ça peut faire très peur, car tout le monde n'est pas James Gunn.

Marvellous

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