Threads forme avec The War Game ("La Bombe" en VF) de Peter Watkins un diptyque à 20 ans d'intervalle sur le thème de la menace nucléaire, avec deux approches radicalement différentes, mais qui trouvent un écho intéressant. Aucune surenchère dans l'horreur et l'interprétation ici : tout le processus est dépeint dans une froideur de ton incroyable, des premiers remous à travers la radio et la télévision jusqu'aux conséquences à long terme de la catastrophe. Chaque nouvelle situation est décrite en prenant le temps de retranscrire l'atmosphère et de sonder les mentalités, dans une logique de réactions en chaîne. À noter, toutefois, qu'on peut être induit en erreur par la description du film qui aborde un "13 ans après, avec un Royaume-Uni en pleine reconstruction médiévale", alors que ce segment final n'occupe qu'une toute petite partie du film.
La description clinique, chronologique et ultra-réaliste (c'est l'intention en tous cas, dans la limite du micro-budget offert par la BBC à l'époque) des événements est relativement minutieuse, et l'effet produit étonnant dans son ampleur. La ville de Sheffield sert d'expérimentation théorique à cette observation, en examinant les conséquences sur la population à court (surtout) et moyen / long terme. Dans le contexte de la guerre froide, avec des tensions qui virent au conflit militaire entre USA et URSS en Iran, la destruction mutuelle ici dépeinte devait faire froid dans le dos au début des années 80.
L'histoire d'une jeune femme et de sa progéniture en gestation cristallise des enjeux dramatiques supplémentaires, si besoin était, mais qui à mon sens sont un peu superflus. Elle permet toutefois de tisser un fil rouge du début à la fin, des premières préoccupations radiophoniques jusqu'à la naissance de sa petite-fille difforme dans un Royaume-Uni néo-féodal. Sur ce final abrupt, on peut aussi imaginer ce qu'aurait donné le film si cette dernière partie avait été son objet principal et non sa conclusion un peu rapide. L'environnement dans lequel la fille évolue, le nouveau langage comme déstructuré, le retour à la paysannerie en quelque sorte : avec la même description clinique, il y aurait eu matière à faire un autre docu-fiction indépendant.
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