Le cinéaste anglais Gerard Johnson n’a réalisé que deux courts-métrages avant le film traité ici : Mug (2004) et Tony (2005). Le dernier des deux n’est rien d’autre que la maquette de ce qui allait devenir en 2009 un portrait sobre et réaliste d’un personnage de tueur en série anglais. Tony, version long-métrage, est un film qui risque de refroidir son spectateur (pas au sens propre, sauf en cas de crise cardiaque due au visionnage).
Dans la banlieue londonienne, Tony, bientôt la quarantaine, est un homme solitaire, timide et effacé. Sans travail, il tente, sans succès de nouer des contacts avec diverses personnes qu’il rencontre au hasard de ses errances. Et dès qu’on le contrarie un peu de trop, il tue, purement et simplement..
Ce film – assez méconnu, il faut l’avouer – est porté par un certain Peter Ferdinando, acteur plus que convaincant dans ce rôle (et par ailleurs aperçu dans le très bon polar Face, sorti en 1997, de Antonia Bird). Le style possède un côté documentaire, ce qui rend le métrage d’autant plus inquiétant, comme si Ken Loach avait dressé un portrait du serial killer moyen de son pays, tentant de rendre compte de la vie de tous les jours d’un tel individu. Gerard Johnson ne cherche pas à comprendre le protagoniste, encore moins à le juger ou à excuser ses actes, mais il montre froidement ce qu’est sa vie. Par ailleurs, le malaise est beaucoup plus fort lorsque l’horreur provient de ce qui semble quotidien. Tony est un antihéros comme il y en a peu au cinéma.
(cette critique est parue dans le mensuel satirique liégeois "Le Poiscaille" du mois de juin 2013.
Site : www.lepoiscaille.be)