A l'instar d'un Loach, le cinéma social des frères Dardenne forme un tout homogène mais dont chaque œuvre séparée possède sa structure particulière et des nuances dans le ton. Pour évoquer l'immigration africaine en Belgique et l'utilisation des enfants et adolescents qui en sont issus à des fins délictueuses, les réalisateurs ont choisi d'épurer leur trame jusqu'à l'os, nous privant de ce fait d'un certain nombre d'informations qui auraient été utiles pour comprendre les situations qui nous sont délivrées sans ménagement, nous immergeant de manière brutale dans une jungle urbaine sans pitié. Le film est entièrement focalisé sur ses deux jeunes héros, interprété par des amateurs parfois livrés à eux-même, le reste étant composé d'individus nuisibles et sans nuances aucune. La solidarité entre les deux personnages principaux est touchante mais la linéarité du film ne leur donne pas une consistance suffisante pour que l'on se prenne vraiment à les accompagner dans leur court périple hérissé de dangers. Les messages sous-jacents sont suffisamment compréhensibles pour que les Dardenne se contentent de faits (jusqu'à quel point sont-ils inspirés par la réalité ?) exposés dans leur crudité. C'est efficace mais sur un mode mineur dans un exercice tout entier tourné vers le drame et donc nécessairement frustrant pour qui attend davantage sur le plan narratif, sans parler d'une mise en scène purement fonctionnelle.