Film sublime de bout en bout.Ça commence comme un reportage sur un mouvement politique, la lutte d’une ONG contre le groupe pharmaceutique responsable de la crise des opioïdes ayant tué 1/2 million d’américains, et puis, le film bascule, devient un genre de biopic, nous narrant le parcours d’une artiste, sa vie, de son enfance jusqu’à ses engagements societaux.
Le portrait d’une société est passé au peigne fin: l’Amérique, dans sa superficialité, son fanatisme et son hypocrisie. A elle s’oppose un contre-modèle, une culture alternative et underground, faite de libération sexuelle, d’art et de drogue. Évidemment la bataille est perdue d’avance, et le sang versé dans cette dernière n’en est alors que plus tragique.
La réalisation du documentaire est d’une radicalité appréciable, se structurant à moitié autour de photographies d’époque, prises par les protagonistes, et offrant un point de vue unique sur les 70s new-yorkaises, dans leur bassesse la plus crasse et la plus sublime. Une étrange mélancolie s’en dégage alors, au fur et à mesure que Nan Goldin nous parle, que ses œuvres et ses amis apparaissent et disparaissent, nous laissant devant ses souvenirs, son histoire. On a comme le sentiment (très réjouissant) que ces thèmes-là sont apparus à la réalisatrice au cours du tournage, et que tout ceci est devenu central sans que ça ne soit prévu au départ: on aurait simplement pu avoir un (très bon) documentaire à charge sur l’industrie pharmaceutique.
Au final, on ressort de ce film subjugué, en colère aussi un peu, mais avec la certitude d’avoir découvert des parcours, des individus et des luttes uniques qui méritaient une telle œuvre pour leur rendre justice.
(Ps: il faut décidément que je lise Heart of Darkness)