Irritation game
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Shyamalan a toujours des idées formidables pour faire des films. Ici, voici un Serial Killer traqué par des centaines de policiers bloquant les sorties d'une salle de concerts, avec des milliers de spectateurs venus applaudir une vedette de la pop actuelle : comment va-t-il s'en sortir, sans attirer l'attention de sa fille de 12 ans qu'il a amené au concert ? Brillant, non ?
Le problème est que Shyamalan semble avoir de plus en plus de difficultés, non seulement à conclure ses films (on regrette même l'époque des "twists" finaux que l'on jugeait alors "artificiels"), mais même à les réaliser. Où est donc passé l'intelligence de sa mise en scène, si souvent louée ? Où sont passées ses réflexions politico-sociales pertinentes sur les USA ? Dans Trap, rien ne fonctionne réellement, et on ne parle pas seulement des invraisemblances qui s'accumulent au long des presque deux heures de film. Ça pourrait être un détail, mais ça ne l'est pas, l'artificialité du son, visiblement post-synchronisé, pour éviter que les dialogues ne se perdent dans le brouhaha du public et dans la musique sur scène, déréalise la majorité des scènes ayant lieu à l'intérieur de la salle de concerts.
Evidemment, Trap fait fortement penser au défi parfaitement relevé par De Palma dans son sous-estimé Snake Eyes, et cette comparaison est impitoyable pour Shyamalan, tant - on l'a déjà dit - au niveau du brio de la mise en scène que de l'intelligence conceptuelle mise en œuvre. L'autre problème est que Josh Harnett- surcoté par la critique en général pour son interprétation assez caricaturale, en fait - n'est pas du niveau d'un Nicolas Cage !
Mais le pire reste à venir : le dernier tiers du film se déroule en dehors de la salle de concerts, ce qui n'est clairement pas une bonne idée. Même si l'effet de suspense fonctionne correctement, l'accumulation d'absurdités dans l'enchaînement des scènes désamorce totalement notre intérêt, jusqu'à un dernier plan qui laisse entendre que, comme pour les héros de Unbreakable / Split / Glass, on entendra à nouveau parler du Butcher ! Ce qui ne nous ravit guère.
Une excuse que nous trouvons à cet échec : Shyamalan a voulu payer à sa fille Saleka le kiff ultime, celui de se produire devant une foule comme si elle était une mini-Taylor Swift. Le fait qu'elle ne sache pas réellement jouer un rôle - encore un bémol à l'efficacité de la dernière partie du film - confirme d'ailleurs parfaitement cette hypothèse d'amour paternel, ce qui transformerait Trap en GRAND film méta, l'amour du serial killer pour sa fille était finalement le point central du scénario. Et si, vu sous cet angle, Trap était en fait une manipulation de plus d'un metteur en scène de films "de genre" / tueur en série ne visant qu'à faire le bonheur sa fille chérie chanteuse / spectatrice ?
[Critique écrite en 2024]
Créée
le 10 août 2024
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