Traquée
5.8
Traquée

Film de Brian Duffield (2023)

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Des choses gentilles à dire sur ce film :

Home invasion du quatrième type, No One Will Save You donne dans le feutré autant sur le fond que sur la forme. On y suit les mésaventures de Brynn (Kaitlyn Dever) qui vit seule aussi bien dans sa grande maison qu’au sein de sa communauté, aux prises avec des phénomènes extraterrestres... Un isolement qui justifie l’idée maîtresse du film : tout s’y déroule, si ce n’est en silence, en tout cas, sans paroles.

Le parti pris n’est pas totalement inédit mais en tout cas rafraîchissant et surtout adroit. Brian Duffield se déleste d’un certain nombre de ficelles et d’artifices dispensables mais aussi nous épargne un côté démonstratif qui, en plus d’être toujours un peu désagréable, tend parfois à neutraliser les émotions et alourdir les films. Le réalisateur fait coup double dans la mesure où il donne aussi plus de poids aux thèmes qu’il explore : traumatisme, culpabilité, non-dits, ostracisation etc. La forme répond au fond.

Duffield va privilégier par la suppression des paroles et des échanges une forme de tension constante qui ne va pas s’appuyer nécessairement sur des effets tonitruants. La solitude dont souffre Brynn joue tout autant que le verre brisé, les poursuites échevelées et les coups de porte de placard. Les moments calmes sont plus assourdissants encore que les chocs et les explosions.

La mécanique du film est du reste redoutable. La première confrontation est assez révélatrice. Elle arrive rapidement, à peine introduite par une marque dans l’herbe du jardin, élément devenu au fil du temps une tarte à la crème de ce pan de la culture populaire et de l’ufologie sur laquelle il s’appuie. Brian Duffield n’a pas à reposer des éléments qu’on connaît déjà. À l’inverse du chef-d’œuvre Rencontres du troisième type auquel il fait bien évidemment référence, No One Will Save You ne va pas jouer sur les apparitions diffuses et progressives : pas d’évènements amenés au compte-goutte, d’emblée on est dedans. Si le chemin est balisé par les prédécesseurs de Rencontres du troisièmes types à Sign en passant par les Invasion des profanateurs de sépultures voire le Dernier pub avant la fin du monde sur la question de l’assimilation, ça ne veut pas dire que le film de Duffield est dénué de surprises.

Niveau effet visuels, c’est très soigné. Les pièces maîtresses, les gris, que l’on voit très tôt dans le métrage sont plutôt réussise, fidèles à la représentation canonique mais pas tout à fait : les p’tit gris de base sont dotés de mains en guise de pieds là (détail qui donne un peu plus d’effet à ses galopades notamment), d’autres ont des articulations en surnombre qui rappellent la mante-religieuse (élément insectoïde présent aussi dans le folklore ufologique)... Heureusement pour l’héroïne (et la durée du film), ils sont dans l’ensemble assez cons-cons, on n’est clairement pas du niveau d’un Predator ni même d’un marmot motivé de grande section de maternelle.

L’héroïne justement tient la route grâce à l’interprétation de Kaitlyn Dever qui, habitée, porte tout le film sur son innocence : d’apparence fragile et juvénile donc en état de vulnérabilité mais dont la force de vie est palpable à l’écran. Autre point fort qui permet au concept de fonctionner, la musique, discrète mais qui réussit à s’imposer et renforcer l’ambiance étrangement ouatée construite par Duffield... et dans un film quasi sans parole, c’est nécessaire.

L’équilibre est parfait sur la majeure partie du métrage... dommage que le réalisateur finisse par le perdre dans son final, en appuyant un peu trop en arrivant sur la révélation puis la rédemption. Mais bon, on ne va pas faire la fine bouche devant un film qui reste dans l’ensemble aussi audacieux que soigné.


Hum... ce film ne compte assez d'ingrédients pour jouer au bingo avec une grille de 36 cases, mais voilà quand-même les 20 ingrédients repérés


Personnage > Agissement

Se regarde dans un miroir > Maquillage, nœud de cravate, etc. – Tension > Met sa main devant sa bouche ou celle d’un autre personnage pour s’ / l’empêcher de hurler

Personnage > Caractéristique

Blues > Sa femme, sa fille sa mère ou sa sœur est morte – Tension > Hanté·e par des souvenirs traumatisants

Réalisation

Bestiole qu’on devine galoper sous les vêtements/les draps/la peau – Course-poursuite > Gros plan du pied sur la pédale d’accélération ou de freins – Fin > Le mot FIN apparaît en toutes lettres à l’écran – Technique > Prises de vues multiples pour une même scène – Tension > Caché·e

Réalisation > Accessoire et compagnie

Tension > Ampoules qui pètent mystérieusement

Réalisation > Surprise !

Tension > Menace qui apparaît dans le dos d’un personnage

Scénario > Contexte spatio-temporel

Cimetière

Scénario > Élément

Tension > Porte qui se referme toute seule

Scénario > Ficelle scénaristique

Cauchemar > Se réveille en hurlant/en sueur/en sursaut – La chatte à Mireille – Plus de réseau téléphonique – Trahi·e par : un éternuement, une sonnerie de téléphone, une branche qui craque, un objet qui tombe, etc.

Scénario > Situation

Agissement > Se recueille sur une tombe/devant un cercueil, etc. – Bagarre > Préparation avant une bataille

Thème > N’importe quoi

Non-suspension d’incrédulité > Pourquoi les extraterrestres sont-ils toujours humanoïdes ?

---

Barème de notation :

  • 1. À gerber
  • 2. Déplaisir extrême et très limite sur les idées véhiculées
  • 3. On s'est fait grave chier
  • 4. On s'est fait chier mais quelques petits trucs sympas par-ci par-là
  • 5. Bof, bof ; pas la honte mais je ne le reverrais jamais ; y'a des bons trucs mais ça ne suffit pas
  • 6. J'ai aimé des trucs mais ça reste inégal ; je pourrais le revoir en me forçant un peu
  • 7. J'ai passé un bon moment ; je peux le revoir sans problème
  • 8. J'ai beaucoup aimé ; je peux le revoir sans problème
  • 9. Gros gros plaisir de ciné
  • 10. Je ne m'en lasserais jamais

Créée

le 9 mai 2024

Critique lue 21 fois

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