Après une série de films peu valorisants comme Attention les enfants regardent, le Toubib ou Airport 80 Concorde... Alain Delon avait envie d'orienter sa carrière en s'alignant sur celle de son concurrent et néanmoins ami Belmondo ; on voit en effet qu'il tente de rester dans la course au box-office comme Belmondo qui venait de connaître un gros succès avec Flic ou voyou et qui allait récidiver avec le Professionnel. Delon n'avait pas connu un vrai gros succès depuis Mort d'un pourri en 1977.
Pour retrouver cette voie du succès, il fait appel à son vieux complice Jacques Deray qu'il retrouve pour la septième fois et avec qui il a tourné de bons films comme la Piscine, Borsalino ou Flic Story... Delon s'improvise co-scénariste avec Christopher Frank en adaptant librement un roman néo-noir de J.P. Manchette, "le Petit bleu de la côte Ouest". Le scénario est assez basique, il permet à Delon d'incarner un personnage monolithique d'homme traqué, solitaire et taciturne, et le film entièrement bâti autour de lui, inaugure une formule qui sera reprise dans ses films suivants comme Pour la peau d'un flic (qu'il réalisera lui-même) et le Battant, voire même plus tard dans Parole de flic.
Bien secondé par l'Italienne Dalila Di Lazzaro qui tient pourtant un rôle décoratif, et surtout par d'excellents comédiens dont beaucoup évoluent sur les planches, comme Pierre Dux, Michel Auclair, François Perrot, André Falcon, Jean-Pierre Darras, Bernard Le Coq ou Feodor Atkine, Delon livre une bonne prestation en prouvant qu'il ne faut pas s'arrêter pour aider un accidenté, ça ne rapporte que des ennuis.
La mise en scène est très efficace et musclée, avec quelques morceaux de bravoure (dont une belle poursuite en voiture, cliché encore pas trop éculé en 1980) et quelques scènes violentes ; le film au ton sec et brutal, est très proche d'un style de polars des années 70, en même temps, on est en 1980, le virage de cette décennie est à peine amorcé. Si bien que le film dont le final peut surprendre, sera un des plus gros succès de la vedette Delon, raflant pas moins de 2 millions de spectateurs en salles, y compris moi car j'y étais, et j'ai toujours revu ce polar avec plaisir. Bref, c'est du polar français cousu main, classique mais efficace et bien maîtrisé, qui a redonné un sérieux coup de fouet à la carrière de sa vedette, Belmondo pouvait légitimement s'interroger.