"On aurait pu défendre le dernier film de Desplechin par conformisme. Depuis ses débuts avec la Sentinelle, la critique n’a eu de cesse de louer, à raison, un nouveau grand talent du cinéma français. Mais avec la sortie de Jimmy P. en 2013, une limite s’est dessinée ; il s’agissait d’un film de qualité certes mais tout le monde s’est comme forcé à l’adorer. Une intrusion intéressante dans le cinéma Hollywoodien par un enfant de la Nouvelle Vague (bien que ce dernier ait un rapport plus complexe à cet héritage), Jimmy P. paraissait bien limité côté des fulgurances de Rois et Reines ou de l’instabilité de son Conte de Noël. Desplechin, cinéaste qui s’intéresse aux tabous et aux non-dits s’est trouvé enfermé dans les codes du cinéma américain. Le préquel de son œuvre phare Comment je me suis disputé… faisait craindre le pire, pensant que le cinéaste en soit réduit à ranimer son aura en ressassant son succès passé. Il n’en est rien.
Le passé, il en est bien question dans Trois souvenirs de ma jeunesse, il s’agit même de son sujet. Si les temps anciens n’avaient pas été aussi bien traités depuis longtemps, c’est que Desplechin a parfaitement compris qu’il fallait raviver une fougue romantique disparue de nos jours. La mélancolie Proustienne et la finesse de la psychologie des personnages offrent au cinéaste des possibilités débordantes et subtiles pour sa mise en scène. Jamais le fantôme de François Truffaut ou de Jean Eustache n’a semblé si présent dans un film que celui-ci ; jamais des lettres d’amours dites face caméra ne nous avait autant touchées. Œuvre sur une vie, celle de Paul Dédalus, le film semble être la somme du cinéma d’Arnaud Desplechin.(...)"
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