Bon… Euh… comment commencer ? Je dois avouer que j’ai encore un peu de mal à me remettre de ce que j’ai ressenti pendant l’heure et demi de ce ‘sublime’ John Ford ! Bon allez, je m’y mets !
Après le tournage éprouvant du Cheval de fer, JF fit une (petite) pause western, pour y revenir avec Trois sublimes canailles. C’est vrai qu’il y a quand même une grosse nuance entre la traduction française et l’originel : Three bad men. A mon avis, les deux sont bons, même si je préfère finalement le titre français, un peu plus spoiler, mais aussi plus ambigu…
L’histoire tourne donc autour de trois ‘sublimes’ canailles (non, sans blague !) qui escortent une jeune fille, Lee Carlton, dont le père est mort tué par des voleurs de chevaux (patati patata je ne vais pas vous raconter toute l’histoire). En tous cas, pour résumer, y a le méchant, un sheriff, Layne Hunter, ces trois hors la loi, la fille et celui à qui elle fait les yeux doux (et plus) Dan O’Malley (George O’Brien). Et tout ce petit monde fait la course pour trouver un petit coin de brousse pour planter leur maison, avec si possible de l’or tout prêt, c’est mieux. Parce qu’en fait, l’histoire se passe pendant la grande ruée vers l’or de 1877, celle organisée par le gouvernement après avoir piqué les terres des Sioux.
J’ai délibérément pris un ton léger pour poser l’histoire, car c’est ce qui se passe dans le film : de léger, voir burlesque, il devient beaucoup plus sombre, et si on rit de bon cœur pendant la première moitié du film, on a plutôt envie de pleurer après. Sa grande force est je pense, contrairement à ce que beaucoup d’autres, son scénario. En effet, il est assez banal pour nous plonger dans un western classique, mais c’est pour mieux nous surprendre ! De comique, il devient sombre (oui je l’ai déjà dit), et de personnages et situations stéréotypées (l’histoire d’amour, le méchant bien méchant, et un George O’Brien bien gentil et bien beau), Ford arrive à nous ébranler, créant soudain des séquences à la Leone, une violence inattendue, et des caractères en avance sur le temps. Je pense bien-sûr aux trois canailles : héros subversifs, drôles et violents, simples et émouvants.
La mise en scène est plus sobre que dans Le cheval de fer, mais aussi efficace. La séquence de la course, agrémentée de détails historiques (le journaliste et le bébé) est particulièrement réussie, commençant par un premier plan sublime : un travelling latéral le long des participants. Le montage est rythmé, l’action est au service du scénario. Le jeu d’acteur est simple, mais saisissant, et crée une vraie impression d’authenticité, renforcée par la séquence dans la ville, qui prend tout de même la moitié du film.
Pour finir, je dirais que c’est un film bouleversant de simplicité et d’authenticité, pourtant d’un lyrisme bouleversant, qui joue déjà des clichés du genre très jeune du western (reconnu seulement depuis La caravane vers l’ouest, soit à peine deux années auparavant). Sont présents ici de nombreux thèmes que l’on retrouvera dans le cinéma de Ford bien-sûr, mais aussi de Leone ou de Eastwood. En tout cas, c’est pour moi le meilleur John Ford muet à ce jour !