Après plusieurs années d'absence en tant que réalisateur - et même en tant qu'acteur - Mel Gibson signe un retour fracassant en 2016 avec Blood Father et Tu ne tueras point. Pour sa dernière réalisation, il adapte la bravoure du soldat Desmond Doss qui par conviction religieuse refusa de prendre les armes durant la Seconde Guerre Mondiale. Et avec cette histoire, Gibson nous livre un grand film.
Bien qu'il aurait été facile de sombrer dans une histoire naîve et un peu moralisatrice, celle-ci se montre au contraire touchante et profonde. Il est vrai que l'on pourrait trouver lourd l'aspect religieux du soldat Doss mais ses convictions firent sa force. Il souhaitait sincèrement servir son pays de la meilleure façon possible sans pour autant trahir ses idéaux. Et c'est intéressant de voir que ses idéaux le dépassent, il ne saisissait que de la religion sa compréhension la plus basique, littérale. Quand il lit dans la Bible "Tu ne tueras point", il comprend qu'apprendre à user d'une arme est une étape vers le meurtre et qu'il ne doit pas le faire. A ce titre, la scène du jugement où il exprime ses idéaux, sa conception des choses, est extrêmement touchante... Il faut dire que je ne suis pas totalement objectif car mon propre père a été objecteur de conscience et a refusé de faire son service militaire par conviction religieuse. Dès lors, quand il a vu cette scène, cela a remué de nombreuses souffrances chez lui qu'il aurait pus s'épargner s'il avait accepter de servir. Comme pour Doss, il est plus simple de se servir d'une arme que de refuser de l'utiliser et, à n'en pas douter, il s'agit d'une preuve de courage. Ce film, par cet aspect, rend justice à ces personnes que l'on considère trop souvent comme des lâches ou des faibles alors qu'ils font montre d'une véritable hardiesse. Et le soldat Doss prouvera sa bravoure au combat ...
Ce qui me permet d'aborder la partie technique de ce long-métrage. Nous savions déjà que Mel Gibson est un excellent metteur en scène et Tu ne tueras point le confirme une fois de plus. La mise en scène est exceptionnelle, Gibson façonne des plans d'une extrême beauté et les scènes de combat sont impressionnantes et très esthétisés. Nous sommes pris dans la violence de la guerre et si l'aspect gore peut rebuter et paraître superflu, elle permet de voir la guerre en face. Même si l'on connaît plus ou moins les impacts physiques d'une guerre, ce film nous met une claque. Corps démembrés, sang, visages meurtris ... Ça choque et c'est l'effet recherché. Tout ça est est magnifié par un cadrage précis et d'une photographiea absolument sublime.
L'interprétation est également bonne mais légèrement en deçà de la qualité globale. Andrew Garfield malgré ses qualités de jeu indéniables manque quelque peu de charisme mais reste toutefois très bon dans un rôle pas si simple à jouer. Sam Worthington et Vince Vaughn sont bons mais sans plus tout comme Teresa Palmer ou encore Luke Bracey. Reste Hugo Weaving et son charisme ainsi que sa profondeur de jeu habituels rendant intense ses moments de folie mais aussi sa relation avec son fils. Malgré tout, c'est cet élément du long-métrage de Gibson qui manque son but et l'empêche d'être un sans faute.
Cela n'empêche toutefois pas Tu ne tueras point d'être une véritable réussite, une œuvre puissante et riche. Elle permet surtout de rendre justice à ses objecteurs de conscience au courage trop souvent raillé et oublié. La dernière réalisation de Mel Gibson est l'un des plus beau film de l'année 2016 et laisse présager le meilleur pour le reste de la carrière de l'acteur/réalisateur.