Une histoire de terroir et une histoire familiale. Paul de Marseul, propriétaire d'un grand vignoble dans le Saint-Emilion, n'aime pas Martin, son fils unique, héritier du domaine, un bon à rien selon lui. Pas assez de charisme, pas assez de gueule, pas assez de personnalité, que sais-je ? Et ce n'est pas nouveau, depuis sa naissance, en fait. Alors, en faire son successeur, ce n'est pas possible.
Et pourtant Martin s'accroche désespérément, est plein de bonne volonté, attend un soutien qui ne vient jamais. Au contraire, il essuie les rebuffades, les humiliations devant le personnel du vignoble … Jusqu'au jour où la goutte de trop fait surverser le vase …
Paul de Marseul, c'est Niels Arestrup. Excellent dans le rôle de ce père, maître tout-puissant, bon vivant, véritable esthète du vin, l'œil à tout dans le domaine. Sympathique bonhomme, il n'y a pas à dire, mais avec une sympathie très sélective. Il semble que Depardieu fut pressenti pour le rôle. J'imagine d'ici le personnage que ça aurait été : moins feutré peut-être mais tout aussi efficace. Face à lui, Martin, le fils, interprété par Lorànt Deutsch. Le père l'a relégué aux écritures, le boulot (indispensable et ingrat) qu'on n'aime pas faire dans un domaine. Alors, évidemment, question carrure, question gueule, Lorànt Deutsch, c'est sûr, ça ne le fait pas. Lorànt Deutsch est excellent dans ce rôle de fils qui veut croire en son père malgré son mépris affiché, qui veut s'investir mais qui se heurte à un véritable mur lisse.
Entre Paul et Martin, il y a le maître de chai interprété par Pierre Chesnais, gravement malade et son fils, Philippe (Nicolas Bridet) rentré de Californie où il travaille dans un domaine viticole.
Spoiler : Le pire, c'est que Philippe, le fils du régisseur a tapé dans l'œil du patron, Paul et pourrait bien évincer Martin.
Le film consistera désormais en une partie mortelle entre les quatre hommes sous le regard impuissant des femmes.
Des femmes impuissantes, certes, mais des femmes de caractère, des femmes protectrices. Valérie Mairesse dans le rôle de l'épouse du maître de chai. Mais surtout, un rôle très réussi d'Anne Marivin, épouse de Martin.
"Tu seras mon fils" est un film très sombre (presque noir comme ce fameux vin de Bordeaux …), affreusement pessimiste où la Mort rode dès le générique de début du film. La Mort a déjà frappé par le passé et renifle ce drame familial dans l'attente de probables nouvelles prises.
Gilles Legrand, le réalisateur et scénariste, a signé, là, un beau film très dense, aidé par une belle photographie d'Yves Angelo. Nul doute que j'essaierai de trouver d'autres films de Gilles Legrand que je découvre....