Jason Reitman s’est fait une spécialité du cinéma représentant la vie de tous les jours ou l’évolution de notre société et de ses mœurs. A chaque fois il le fait avec la même veine humaniste et en prenant soin de ne jamais juger ses personnages mais plutôt en les regardant avec beaucoup d’affection. On l’a vu avec le culte « Juno » et son adolescente enceinte mais aussi avec « Men, women and Children » sur les conséquences des nouvelles technologies sur les relations humaines. Ici, il reprend son actrice de « Young Adult », Charlize Theron, non pas pour un rôle aussi fantasque, mais pour une immersion dans le burn-out de la maternité, sujet peu traité au cinéma si ce n’est sous l’angle de la comédie potache. Ici point de cela ! Hormis les quelques sourires autorisés par les dialogues mordants (et excellents) signés par sa scénariste habituelle Diablo Cody, qui porte toujours un regard aussi acéré sur notre société, on est plutôt dans une veine mélancolique et un peu triste. Une tonalité qui colle parfaitement à « Tully » puisqu’on est dans le blues de la maternité et un certain côté dépressif, parfaitement retranscrit par une Charlize Theron encore une fois parfaite. D’ailleurs on ne voit qu’elle et les seconds rôles ont d’ailleurs un peu de mal à exister jusqu’à l’arrivée de Mackenzie Davies, qui incarne un parfait contrepoint solaire à la star dans un rôle cependant plus simple et attendu.
Mais « Tully » manque quelque peu de cinéma. Le sujet est intéressant mais ne surprend jamais, tout comme la réalisation tout juste digne d’un téléfilm de l’après-midi. Formellement tout est trop classique et manque cruellement d’idées. Du coup, on devient petit à petit aussi neurasthénique que peut l’être le personnage principal. Attention, on ne s’ennuie pas pour autant, « Tully » ayant l’intelligence d’être court et d’éviter toute redite ou longueur. Mais on aurait aimé tout de même quelque chose de plus étonnant et vibrant, de plus inventif visuellement, tout comme un surplus d’émotion(s), que seule l’interprétation de Charlize Theron parvient à procurer par intermittences. C’est davantage la justesse du propos qui parvient à nous convaincre. Le réalisateur et sa scénariste ont un sens de l’observation d’une finesse inouïe qui permet de rentrer de plein pied dans ce que traverse Marlo. On sent le vécu, le réalisme et une grosse couche de délicatesse dans le film et c’est important pour un tel sujet. Pour terminer, difficile de dire si le retournement de situation final est ici pertinent ou totalement hors contexte. En effet, digne de « Sixième sens », il est certes étonnant à plus d’un titre mais pas vraiment nécessaire si ce n’est d’ajouter une dose de psychologie inutile au film. Bref, Jason Reitman est dans la routine de ses précédents films, loin de son chef-d’œuvre romantique, et seul film du genre de sa filmographie, le sublime « Last days of Summer ».
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