Un amour impossible est une oeuvre tiraillée par un paradoxe insoluble. Deux personnages, artificiellement rajeunis puis vieillis, sont représentés par leurs corps uniques, celui d’un seul acteur. Leurs corps sont personnages. En revanche, une autre protagoniste essentielle est incarnée par quatre actrices différentes. Cette tension est la problématique majeure du film.
Catherine Corsini adapte le livre autofictionnelle éponyme de Christine Angot qui débute avant la naissance de Chantal, le pseudonyme du personnage de l’écrivaine, et se termine à l’orée de ses quarante ans. Elle y expose l’itinéraire et la romance de Rachel (la mère de Chantal interprétée par Virginie Efira) une jeune fonctionnaire, et de Philippe (Niels Schneider), un bourgeois l’ayant mise enceinte avant de la délaisser. La mécanique de l’emprise dévastatrice que Philippe exerce d’abord sur Rachel puis sur sa fille se développe, implacable et sordide. C’est un antagoniste total qui ne souffre pas du relativisme académique, que l’on peut être tenté de respecter pour « instaurer un minimum de complexité ». La mise en scène fait état de ce point de vue : Philippe est systématiquement en position dominante grâce au cadre préservant cette cohérence dans toute leurs séquences en commun avec Rachel. Quelques écueils subsistent cependant dans cette logique d’antagonisme, comme la lecture face caméra de certaines des lettres les plus abjectes que Philippe envoie à la mère ou à sa fille (afin de « défendre son rôle » d’une certaine manière). Malgré cela, il contrebalance l’individu solaire campé par Efira. Dans une harmonie formelle (par le traitement respectif de leur corps), ils rejouent ensemble le rapport de force entre le machiavélisme outrancier de l’un et la naïveté puis la mélancolie de l’autre, toutes temporalités confondues, à partir d’une séquence matricielle : alors qu’elle évoque un mariage dont il ne veut pas entendre parler, il l’empoigne par le sexe, la faisant perdre toute maîtrise et contrôle d’elle-même.
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