Ce film a frappé un grand coup en 1975, je m'en souviens, je ne l'ai pas vu à sa sortie pour une raison que j'ai oubliée (je le verrai bien plus tard en VHS) mais on en parlait beaucoup dans la presse, c'était le grand envol de Pacino vers une starisation qui ne le quittera plus. En effet, après la révélation dans le Parrain où les regards étaient braqués sur Brando et la force du sujet, Serpico lui fournit un rôle fort, mais avec Un après-midi de chien, il met en place son jeu à la fois fébrile et grandiose pour un grand numéro d'acteur.
Mais le film, même s'il repose sur le grand Al, vaut aussi pour le talent de Lumet qui dépeint efficacement et sans esbroufe une situation extrême où se dévoile un aspect de la société contemporaine. Il analyse avec beaucoup d'acuité toutes les situations qui se greffent peu à peu autour de cette prise d'otages, et tous les comportements : voyeurisme de la foule, détraqués qui téléphonent à la banque, nervosité ou sang-froid des flics, faiblesses des otages, avidité des médias pour s'octroyer un scoop et leur façon cynique de transformer un braquage en spectacle, et surtout désarroi et fragilité mentale d'un paumé, rattrapé par le Vietnam, par les violences policières (le fameux "Attica, Attica" que Pacino hurle pour se mettre la foule de son côté), et par son homosexualité plus ou moins refoulée qui ne résiste pas au vertige de se retrouver soudain au devant de l'actualité.
Tout ceci échappe à tous les stéréotypes habituels, Lumet brasse en même temps otages, criminels, policiers et homosexuels dans une atmosphère électrique et survoltée, servie par d'excellents acteurs, dont on retient outre Pacino, Charles Durning, l'officier de police qui tente de négocier avec Sonny, et John Cazale dans le rôle de Sal, le partenaire tendu de Sonny. Ce film qui s'inspire au départ d'un fait divers authentique, est parfois dérangeant, parfois un peu long et aurait gagné encore plus avec un meilleur rythme, mais ça reste un grand film, l'un des meilleurs de Lumet.