Un polar assez moyen, auquel j'accorde tout de même 6/10 car il s'agit d'un des premiers films de serial killer du cinéma français "moderne" (on se souvient que Gabin traquait déjà un tueur de femmes dans "Maigret tend un piège", de même que Belmondo dans "Peur sur la ville"). L'originalité étant ici qu'on suit le point de vue de l'assassin, au même titre que celui du flic et de la victime.
Avec un regard contemporain, on relève diverses maladresses et invraisemblances, mais outre l'ancienneté du film qui inspire l'indulgence, il faut souligner la capacité du réalisateur et scénariste Michel Vianey à installer une ambiance sombre et pesante.
Après deux comédies, il s'agit pourtant du premier film noir de Vianey, qui tournera deux autres polars dans les années 80 : "Un dimanche de flic" (une réussite) puis "Spécial Police" (franchement raté).
"Un assassin qui passe" ne joue pas la carte du mystère ni du suspense proprement dit, se plaçant sur le terrain du polar psychologique, avec ce portrait troublant de deux marginaux qui finalement se ressemblent : le flic borderline et le tueur à visage humain, qui crève de solitude.
Jean-Louis Trintignant a plus de talent et de métier que Richard Berry, mais chacun parvient à apparaître crédible dans son rôle. Entre ces deux hommes blessés, la québécoise Carole Laure apporte une touche d'humanité (et d'érotisme), dans la peau d'un personnage non dénué d'ambigüité...
Bénéficiant de la photo sombre et élégante de Bruno Nuytten, et d'une musique jazzy signée Jean-Pierre Mas, ce film pessimiste diffuse une atmosphère étrange et oppressante, à l'image de cette scène nocturne dans les bois, éclairée par les phares d'une voiture, macabre et saisissante.
On ressent parfois l'influence du giallo italien, à l'image de ce couteau phallique brandi par le tueur.
Si "Un assassin qui passe" ne restera pas dans les annales, plombé par certains passages plus faibles et quelques longueurs, le film se laisse regarder sans ennui, et avec une certaine curiosité.