Philippe est un cadre d’entreprise partagé entre une crise professionnelle et une fracture familiale, en plein divorce avec Anne, tous deux rompus par l’absence de l’un et les sacrifices de l’autre. Les querelles bureautiques s’enchaînent, Philippe est souvent au pied du mur, réprimé par une direction hypocrite presque inhumaine et menacé par un syndicat épuisé.
Dans ce drame social poignant, la mise en scène oppresse les états d’âme, immerge dans un monde désenchanté où même la figure de l’enfance (Lucas, le fils) est privée de son ingénuité, remplacée par un comportement hyperactif. Le rythme est dense sans être effréné, ne laissant aucune possibilité de prendre de la distance face à ces cassures humaines. L’impénétrabilité esthétique s’impose par une proximité étouffante, une multiplication de plans serrés sur les visages, les yeux éreintés et rougis.
Naturaliste avec une pointe de satyre, le film dresse avec force le portrait d’un homme acculé par les injonctions sociales et familiales difficilement compatibles, articulées par une société de sur-consommation dont la démesure capitaliste n’est plus à échelle humaine.
Construit autour de multiples discours de sourds plus que négociations, la tension est brisée par des parenthèses où la bulle sacrée du foyer adoucit dans un cadre hors du temps, dans un autre monde. Bouleversant, le film relève d’une puissance inconfortable mais essentielle.