Un espion ordinaire n'a rien d'extraordinaire, du moins dans sa facture, et aurait certainement mérité un traitement un peu plus audacieux. Dominic Cooke a préféré s'en tenir à un récit linéaire, à l'ancienne, que l'on imaginerait presque en noir et blanc pour revenir aux bases du genre. Le film nous plonge dans une des périodes les plus angoissantes de l'histoire de la deuxième moitié du XXe siècle, au moment de la crise des missiles de Cuba de 1962 où l'humanité n'a jamais été aussi prête de connaître l'apocalypse nucléaire. C'est la toile de fond d'Un espion ordinaire qui se base sur des faits historiques pour documenter la singulière relation entre un représentant de commerce britannique et un officier soviétique à Moscou. Davantage que les rouages habituels d'un film d'espionnage, il s'agit plutôt ici de parler de connivence et de compréhension entre deux hommes que tout oppose, de chaque côté du rideau de fer. Costumes, décors et tout ce qui participe de l'environnement de l'Union soviétique de Khrouchtchev sont bien rendus, en tous cas dans l'esprit des nombreux films ou romans qui l'ont décrite. L'autre point fort de ce film, au déroulement simple mais sans trop de temps morts, réside dans l'interprétation de Merab Ninidze et de Benedict Cumberbatch, tous les deux impeccables, le deuxième réussissant le tour de force d'incarner avec le charisme qu'on lui connait le portrait d'un individu honnête et terne dont le courage n'airait jamais été révélé sans des circonstances exceptionnelles.