Ça commence très fort. Les 20 premières minutes sont une plongée brutale dans le monde des bandes de skinhead des années 80 à travers une accumulations de scènes chocs à base de violence, d’humiliation et haine. C'est cru, brutal, réaliste à vous tordre l'estomac. La réalisation va dans ce sens. Une caméra à l'épaule qui suit au plus près la nuque chauve du protagoniste à travers différents plans séquences. Rien de tel pour renforcer l'immersion du spectateur.
Puis le personnage d'Alban Lenoir finit par s'assagir. Assez rapidement il ne se retrouve plus dans l'idéologie que lui et ses potes ont défendu pendant leur jeunesse. Petit à petit, il tente de devenir un mec normal. C'est à ce moment que ça se gâte. Malgré tout le dégoût que l'on peut ressentir face à l'amas de violence montré au début du film, c'est pourtant à mes yeux cette partie qui est la plus intéressante. On y découvre un personnage profond, tiraillé entre la haine et le dégoût de cette même haine. On assiste de l'intérieur aux connivences ambiguës entre une bande d’illettrés au crâne rasé et des cadres en costards membre d'un parti aujourd'hui soutenu par 20% de la population. Essayer de comprendre ce qui peut se passer dans la tête dans skinhead, voilà ce qui est intéressant.
Mais lorsque le personnage se repent, tous ces thèmes sont alors abordé d'un point de vue extérieur, soit le même point de vue que le mien en tant que mec normal non-raciste. Tout ce qui rendait ce personnage intéressant disparaît. Alban Lenoir devient alors un type d'une banalité confondante. Un type comme vous et moi. Quel intérêt y a t-il à filmer la vie d'un mec banal en train de couper des carottes dans sa cuisine ? Bref, toute cette seconde moitié sombre peu à peu dans les abysses de l'ennui.
Un français avait tout pour devenir un bon film. Un sujet à risque, rarement abordé de manière si frontale au cinéma. De bons acteurs, une réalisation qui tient la route et une volonté de faire de ce film un film politique nécessaire en ces temps sombres ou le fascisme n'a jamais été aussi banal. Mais on dirait que l'auteur a eu peur de son propre sujet et a senti le besoin de repentir son personnage pour ne pas être accusé de glorifier les skinheads. C'est dommage car c'est en filmant la violence raciale que la dénonciation de cette même violence est la plus efficace.