Si on veut comprendre Grandrieux on peut le faire au travers de ses nombreuses interview mais vu qu'on a affaire à de l'image on peut le faire en réfléchissant à ce qu'est le travail de Nan Goldin. Au fond, Nan goldin c'est un travail de photographie qui s'oppose à ce qu'est la photographie dans le monde contemporain, est ce une réaction ? bonne question, mais une réaction à quoi au juste si ça en est une ? et bien à cette attache à la 4k, au contrôle total de l'image, l'attache au détail, la recherche d'une certaine "beauté" qui finalement tue l'humain le plus possible au profit de ... l'image ? Là encore il y a un leurre ou une sacralisation de ce que devrait être une image. On râle beaucoup on ne voit rien ou bien c'est flou ou bien le cadrage est pas bon ... chez Nan Goldin il n'y a rien de cela, on pourrait dire que c'est construit en antagonie, mais en même c'est pas réellement "construit", c'est des sentiments "primaire" qui parle, les photos sont faites au feeling, elle prend des petits appareil photos pour pouvoir faire la photo à tout moment, elle néglige pas mal de chose, elle n'ajoute pas de lumière et se contente de la lumière du jour ce qui peut donner soit une image trop sombre, soit trop claire (chose que j'aime beaucoup, ce n'est en rien déploratif de ma part). Il y a aussi un flou de mouvement et qui n'est pas sans rappeler la peinture impressioniste, le futurisme ou l'action painting, sans que ça ne devienne abstrait pour autant, c'est centré sur un certain mouvement et justement c'est ce que Nan Goldin affirme, elle dit que la photo ou l'appareil photo doit être une continuation direct du geste de sa propre main, d'où le manque de contrôle ou dirais je la liberté. Quelques part il y a même quelques choses d'aveugle à tout cela, c'est les mains qui parle plus que le regard et ce n'est pas sans rappeler que même si la 4K et le 60 FPS existe, on peut apprécier ces choses là puisque notre regard d'être humain est limité biologique, on est pas des faucons et l'on assimile difficilement les images au dé là de 25/30 FPS par exemple, ces images nous sembles plus exact et plus "lisse" mais c'est un leurre que provoque notre œil, c'est le même effet que les halos de lumière que l'on voit quand on regarde le soleil ou une lampe, ces halos de lumière n'existe pas, c'est juste une création de l'œil pour s'adapter à l'effet de la lumière. Cette impression de l'exactitude vient aussi d'un certain rapport à la technique où on est fasciné par tout ce qu'elle peut faire mais en réalité elle nous dépasse très largement au point que l'on peut même pas l'apprécier à juste valeur, il y a quelque chose de profondément anti-humain à tout, après... affirmer que la 4K et le 60 FPS sont plus "exact" ce n'est pas faux en soi mais outre des IA qui en décortiquent l'intérêt à notre place, nous on ne peut apprécier ces images véritablement, en fait ... on apprécie dans la 4K et le 60 FPS un certain "flou secondaire" si vous voulez, l'image n'est pas "flou" en soi mais cette aspect "lisse" et "net" ben c'est une réaction de notre œil en réalité, en fait on se trompe sur ce que l'on apprécie exactement, il y a pas de honte non plus à apprécier la 4k en soi mais ! il est préférable d'être attiré par la fascination mortifère même que d'être soi même fasciné ce qui est juste ... une forme d'aliénation lol. Revenons à Grandrieux ! C'est un équivalent à Nan Goldin très directement dans la mesure où pour l'aspect aveugle du geste il va beaucoup plus loin puisqu'il admet que pendant le tournage ça lui arrive de filmer les yeux fermer pour atteindre un aspect purement instinctif du geste, il est fasciné aussi par ce qu'il y a d'animal chez Deleuze. Son rapport à l'image, c'est un rapport différent au regard de façon générale, il a compris qu'une image ou la vision ce n'est en rien quelque chose d'exact mais une reconstruction permanente qu'opère notre cerveau. Cependant loin de moi l'idée de le réduire à Nan Goldin, disons déjà qu'il a beaucoup de points commun avec Deleuze, le côté animal est là très brute de décoffrage à chercher du vrai ou de l'authentique en permanence. Dans la première scène du film y a de ça, on sait que la scène n'était pas vraiment prévue au départ, disons que l'équipe était là dans le froid, Grandrieux a demandé à son acteur d'aller prendre une hache et d'aller couper un arbre dans la forêt et d'un coup il a eu l'idée d'aller filmer ça, il a demandé à toute l'équipe de se déplacer dans la précipitation, puis ils sont parties capturé ça, c'est fascinant. Y a aussi un certain travail du son mais que l'on méconnait, dans les plans d'intérieure Grandrieux avait pour délire de mettre de la noise bien fort, je sais pas pourquoi, il voulait se mettre bien je suppose ... mais dans le plan final ben c'est totalement différent, y a pas un bruit du tout c'est genre ... ultra calme. Y a aussi un intérêt pour la maladie, le fait de filmer un épileptique et de retranscrire la violence de son monde, ce rapport à la maladie il le tient d'une certaine admiration pour Céline ou encore Artaud, même c'est traité différemment, y a cette idée que le corps est une espèce de cage. Dans ce film de Grandrieux en particulier (le pourquoi j'y suis grandement attachée au fond) c'est qu'il est très onirique, probablement car ça se passe dans une forêt et que dans mon esprit je fais un parallèle avec l'univers des contes, y a aussi un travail d'ambiance incroyable, je conseille de le regarder en pleine nuit dans le noir complet, sans aucune source de lumière. 'Fin chuis une sacrée rêveuse et ce genre de truc c'est fait pour moi c'est tout. J'aime aussi le passage où la meuf chante, parfois je revisionne ce passage en boucle tellement c'est touchant, après y a une musique au piano dont j'ignore le compositeur, mais j'adore. Le seul truc un peu dommage avec ce film et le travail de Grandrieux en générale, c'est que ça marche une fois et ... si on aime son cinéma on aimerait véritable l'oublier totalement histoire que quand on le revisionne y est le même effet que la première qu'on l'a vu, parce que ... c'est particulier comme expérience, y a la même chose dans La Vie nouvelle, c'est peut être une redéfinition du cinéma et tout le blabla... mais c'est surtout ce qu'il y a de plus proche de l'effet que vis un aveugle qui trouve ou retrouve la vue, je vous jure, ou à défaut la naissance quand vient la lumière du jour ou... le fait de passe une nuit blanche puis de voir peu à peu comment se lève le soleil. En fait j'adore car... on m'a beau dire que le cinéma à la longue c'est un truc de no-life qui s'enferme dans une chambre noir mais ce genre de film fait apprécier des choses ultra basique dans la vie et j'adhère à fond.