Qu'on l'aime ou pas, on est obligé de reconnaître que Jeunet - pas si différemment par exemple d'un Tim Burton, que la critique adore - a désormais créé un style, que ce soit au niveau visuel comme au niveau narration : tous les deux peuvent irriter, surtout qu'ils ne sont sans doute pas les plus adaptés à un sujet aussi ambitieux et complexe que celui de "Un Long Dimanche de Fiançailles" (ni plus ni moins que la chronique fleuve d'une boucherie inhumaine construite comme une enquête rocambolesque, et illuminée par une histoire d'amour obsessionnelle). Il faudra donc ignorer l'exténuante accumulation de détails, objets, situations qui ont tout de l'image d'Epinal, la vacuité de l'interprétation réduite à de la figuration au sein du film modéle-réduit de Jeunet, et surtout la virtuosité la plupart du temps déplacée de la mise en scène, pour atteindre le cœur du film... qui réussit à battre malgré tout, grâce à un récit (presque) passionnant (Jeunet a du mal avec le suspense, ce n'est pas nouveau). Bon, sur le thème de l'horreur des tranchées, Kubrick est encore loin devant, mais Tardi est rattrapable... [Critique écrite en 2004 et 2005]