La curiosité est, décidément, un bien vilain défaut

Vu à sa sortie en 1978, je me souviens que ce film m'avait laissé perplexe. Puis après plusieurs visionnages à la télé y compris en DVD (qui permet des retours en arrière), à force, je ne le trouve pas si mal…

L'ambiance complotiste, quoi ! On n'y comprend rien et à la fin, on n'a toujours rien compris. Enfin si, on comprend qu'on n'a pas intérêt à chercher à comprendre. Deray ne nous donne aucune clé. Parce qu'il n'en a guère (à part une clé de consigne).

C'est l'histoire d'un homme (Lino Ventura) qui débarque un beau jour à Barcelone et se rend à l'hôtel. Mais au moment de prendre sa chambre, il entend des gémissements dans la chambre d'à côté. Curieux (mais compatissant), il va voir. Mal lui en prend car il se trouve embringué dans une histoire de fous. Oui, de fous car il se retrouve dans un asile psychiatrique avec un sympathique mais très inquiétant médecin (Jean Bouise). Avec un autre fou (vrai, celui-là) joué par Paul Crauchet. Même une fois sorti, le mystère ne cesse de s'épaissir.

Est-ce un film d'espionnage ? Est-ce un film de gangsters ? Est-ce un film d'extraterrestres ? J'aurais tendance à opter pour la première option dans la mesure où les autorités françaises consultées conseillent de laisser tomber, laissant entendre qu'il pourrait s'agir d'une manip pourrie qu'il vaut mieux ignorer… Et d'ailleurs le film n'est pas sans rappeler "Espion, lève-toi" ou encore "la mort aux trousses" où le héros est soit un espion qui est dépassé par les évènements soit quelqu'un pris pour un autre.

De ce salmigondis ou de cet embrouillamini, ressortent la mise en scène de Deray et le jeu des acteurs.

La mise en scène rajoute les points d'interrogation aux interrogations légitimes de Lino Ventura. La photographie est belle mais le rythme est globalement très lent. C'est d'ailleurs un peu normal puisque l'action entre les bandes rivales ou entre les espions concurrents se passe indépendamment de notre pauvre Ventura qui n'en voit que les effets collatéraux…

Le jeu de Ventura en homme lambda qui est aspiré dans une tourmente invisible est efficace. Bien sûr, on ne s'attachera pas aux petits détails comme celui où il est censé avoir été volé mais est quand même capable de payer le taxi en argent liquide …

Jean Bouise est parfaitement inquiétant en psychiatre faussement conciliant mais vraiment tenace.

Paul Crauchet, dans le rôle d'un fou, nous permet au moins de comprendre le titre du film.

Claudine Auger est tout aussi énigmatique dans son rôle trouble de surveillance des mouvements de Lino Ventura.

J'oubliais Jacques Maury qui, avec ses yeux, en demi-lune est pas mal dans le genre "pas clair".

Au final, le film relève un peu trop de l'exercice intellectuel. Bien sûr il se regarde sans problème puisqu'on a bien envie de comprendre les raisons de ce micmac et qu'on n'aime pas voir Ventura prendre des coups sans qu'il ne soit capable de les rendre.

Exercice intellectuel frisant l'invraisemblance : Au départ c'est la "curiosité" de Ventura qui le fait pénétrer à son insu dans une affaire manifestement secrète et clandestine. Soit. Mais gageons que dans la vraie vie, de "bonnes" et "éprouvées" méthodes (musclées) auraient dû régler le malentendu au plus tôt et discrètement.

Pour la note, ce sera 6 à cause du jeu des acteurs et dans le doute, je place ce film dans les listes des films noirs et des films d'espionnage …

JeanG55
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le 23 nov. 2022

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JeanG55

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