Le film de Norman Jewison une adaptation au cinéma de la célèbre comédie musicale de même nom qui fut créée à Broadway dans les années 1960. Mais cette pièce est tirée d'un roman "Tevye le laitier" (que je n'ai jamais réussi à trouver) de Cholem Aleikhem.
Ce dernier vécut en Ukraine jusqu'à la fin du XIX -ème siècle avant d'émigrer aux USA, poussé par la politique de pogroms organisée par le tsar Alexandre III. Autant dire que l'histoire racontée a une forte résonnance autobiographique.
Le violon sur le toit est un symbole qu'utilisa beaucoup Marc Chagall dans ses tableaux. Pour Marc Chagall, lui-même originaire d'un petit village biélorusse, ce violoniste (fiddler) est typique du juif vivant dans un petit village en Europe de l'Est, jouant en virtuose en équilibre précaire sur le faîte d'un toit car l'avenir n'y est pas toujours certain …
Au début de l'histoire, les communautés chrétiennes et juives se côtoient en bonne intelligence (règne d'Alexandre II) et l'ambiance est joyeuse quoique corsetée de traditions et de règles contraignantes notamment pour les jeunes filles en âge d'être mariées. Et le pauvre laitier Tevye, bien brave, en a cinq, de filles à marier … Un petit vent de liberté soufflant, la tradition est mise à mal par ses filles qui préfèrent (nettement) choisir elles-mêmes leur futur époux …
Puis peu à peu l'atmosphère du film s'alourdit jusqu'au décret impérial ordonnant à la population du village de partir sous trois jours, les condamnant à un exil misérable.
Le film est bâti par Norman Jewison comme devait l'être la comédie musicale avec beaucoup de chansons, de chœurs et de danses ponctués par le fameux violon qui joue le rôle d'un témoin ou d'un point-clé. C'est d'ailleurs Isaac Stern qui joue les morceaux (à partir de mélodies Klezmer délicieuses).
Globalement, j'ai bien aimé le film porté par le personnage, dur au cœur très tendre, de Tevye interprété par un formidable Chaim Topol. De plus, le scénario n'a évidemment rien d'une bluette ou d'une comédie musicale classique et il y a des scènes bouleversantes comme celle du mariage de la fille ainée ou la scène d'adieu de la fille puinée qui s'est mariée avec un chrétien, ce qui est vécu pratiquement comme une mort, une exclusion de la communauté. C'est pourquoi les chansons plus amusantes (If I were a rich man, …) ou les scènes drôles avec la marieuse qui parsèment le film sont bienvenues pour éviter de sombrer dans le désespoir.
Oui, j'aime bien ce film équilibré, comme le violon virtuose sur le toit, entre le drame et l'espoir, entre la tradition qui resserre les liens et la tolérance qui ouvre sur l'extérieur.