« This is a new war and it's only beginning. » SELENE

En 2012, après l’échec cuisant de son Total Recall, Len Wiseman, tel un vampire dépossédé de son château, se replie dans les ombres protectrices de sa saga fétiche : Underworld. Ce refuge gothique, empli d’arches ténébreuses et de fresques maudites, lui permet d’échapper aux critiques acerbes qui, comme des pieux de chasseur, ont transpercé son remake. Avec ce quatrième opus, Wiseman parvient à ranimer l’intérêt des fidèles, attirés par la promesse d’une énième bataille nocturne entre vampires et lycans, dans des salles de cinéma pleines à craquer.

L’écriture du scénario est confiée à John Hlavin et J. Michael Straczynski, deux plumes aux accents crépusculaires. Cependant, comme une ombre insidieuse, Len Wiseman ne résiste pas à l’appel des ténèbres créatives. Il s’arroge un rôle de scénariste, infiltrant le contenu narratif avec des idées qui portent sa marque sombre. Cette fusion d’influences transforme le script en une chimère désarticulée, un monstre dont les intentions peinent à trouver une cohésion.

La réalisation est confiée au duo de nullos suédois Måns Mårlind et Björn Stein, dont la méthode de travail est à l’image d’un sabbat désordonné. Ils alternent les jours de tournage comme on tire au sort le chef d’un rituel nocturne, une approche digne d’un mauvais sortilège. Ce chaos structuré, bien que fascinant dans sa bizarrerie, donne naissance à une mise en scène sans âme, où chaque scène semble hantée par l’indécision et la superficialité. Avec une telle alchimie maladroite, le film s’égare dans les méandres d’une esthétique gothique qui ne parvient jamais à envoûter.

En 2012, lors de la sortie de Underworld : Awakening, le film plonge une fois encore dans le clair-obscur des succès de la saga. Les spectateurs affluent, attirés par le spectacle de cuir et de sang, mais l’opinion critique, telle une gargouille perchée, crache son venin. Cette fois, les reproches sont justifiés : un scénario en lambeaux, des personnages figés comme des statues funéraires, et une absence d’innovation qui pèse sur l’ensemble comme un linceul poussiéreux.

L’histoire reprend 12 ans après les événements de Underworld : Evolution, dans un monde où les vampires et les lycans sont chassés et presque éradiqués par les humains. Ce contexte apocalyptique aurait pu donner lieu à une intrigue gothique fascinante, mais il manque cruellement de densité. Selene, réveillée d’un sommeil cryogénique, découvre un monde altéré, mais son parcours, censé être marqué par une quête émotionnelle pour retrouver son amour Michael Corvin, manque de consistance. La mélancolie de cette perte est évoquée, mais jamais explorée en profondeur, laissant une impression de vide.

Kate Beckinsale, l’âme de la franchise, brille toujours par sa présence froide et magnétique. Mais autour d’elle, le vide est flagrant. Aucun des personnages des précédents opus ne revient véritablement. Michael Corvin, essentiel dans les premiers films, est réduit à de simple évocation même si on essaye de nous faire croire vainement que Scott Speedman est au casting. Cette absence est comblée par l’introduction maladroite de la fille de Selene, interprétée par India Eisley, qui hérite d’un rôle ingrat pour son premier rôle au cinéma. La relation mère / fille, qui aurait pu apporter une touche de fraîcheur et d’humanité au récit, sonne creux, desservie par un manque de subtilité dans l’écriture et la mise en scène.

Autrefois figures dominantes des ténèbres, les vampires sont ici réduits à des survivants, cachés comme des rats dans les ombres. Ce changement radical pourrait enrichir l’univers, mais il est traité de manière incohérente. La dissonance entre Thomas le vampire le plus expérimenté des survivants, partisan de la prudence et du repli, et son fils David, défenseur d’une rébellion suicidaire, aurait pu nourrir un conflit dramatique intéressant. Mais la faiblesse de l’interprétation du personnage de David et l’écriture trop simpliste de cette opposition laissent cette dynamique dans l’ombre.

Le rôle de Thomas, interprété par Charles Dance, est sans conteste l’une des réussites du film. L’acteur dégage une aura imposante, presque funéraire, qui sied parfaitement à l’univers gothique. Son interprétation incarne la noblesse déchue des vampires, une figure patriarcale tourmentée, tiraillée entre le désir de protéger son peuple et le poids de siècles. En revanche, son fils David, joué par Theo James, est l’exact opposé. Loin de se hisser à la hauteur de Dance, James est insipide, dépourvu de charisme ou de profondeur. Ses dialogues tombent à plat, et ses expressions sont aussi figées qu’un buste de pierre dans une crypte abandonnée. L’absence totale d’alchimie entre ces deux personnages rend leurs interactions fades et prive le film de l’intensité qu’un tel duo aurait pu offrir.

Les lycans semblent être dans une position similaire à celle des vampires : traqués et affaiblis. Cependant, la révélation qu’ils orchestrent en réalité l’extermination des non-humains aurait dû être un point fort du récit. Ils deviennent les architectes de leur propre renaissance, menant des expériences pour créer des super-lycans, plus puissants et résistants. Cette transformation aurait pu amplifier la tension dramatique, mais le film peine à exploiter cette idée au-delà de quelques scènes d’action. Le fameux super-lycan est impressionnant physiquement, mais il manque l’épaisseur des antagonistes précédents, comme Viktor ou Marcus, qui mêlaient puissance brute et tragédie.

Le choix d’abandonner les effets pratiques pour des monstres générés par ordinateur est une déception majeure. Les lycans, autrefois des créatures palpables et terrifiantes grâce au génie du français Patrick Tatopoulos, sont réduits à des modèles en 3D sans âme. La 3D, omniprésente dans ce volet, alourdit encore l’esthétique du film, qui perd sa texture gothique. L’univers sombre, autrefois riche en détails organiques, se transforme en un paysage numérique stérile et impersonnel, éloignant les spectateurs de l’immersion qu’offraient les premiers volets.

L’autre point positif du casting, outre Charles Dance, est Kris Holden-Ried en Quint Lane. Il parvient également à capturer l’attention par son allure brutale et son intensité. Cependant, sa dynamique père / fils avec le Dr. Jacob Lane, véritable maître d’œuvre de la révolution lycane, n’atteint jamais les sommets tragiques des confrontations passées dans la saga, comme celles entre Viktor et Selene. Stephen Rea dans le rôle du Dr Jacob Lane apporte une certaine complexité au personnage, un scientifique froid et calculateur, moteur de cette nouvelle évolution des lycans.

Underworld : Awakening est un film qui échoue à capturer la magie gothique et l’intensité émotionnelle des précédents volets. Si certains acteurs comme Charles Dance et Kris Holden-Ried apportent un peu de gravité à l’ensemble, le manque d’innovation narrative, l’abandon des effets pratiques, et des choix de casting discutables plombent le film. L’esthétique, autrefois si riche et oppressante, se noie dans un océan d’images numériques fades. Ce quatrième opus s’apparente à une ombre pâle des grandes fresques gothiques qui avaient marqué les débuts de la saga.

StevenBen
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le 9 janv. 2025

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Steven Benard

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