C’est un peu par hasard que le réalisateur Antoine Raimbault s’est lancé dans le projet du film Une affaire de principe. En effet, c’est en réalisant des recherches préliminaires pour un autre film – qui traitait déjà de financement occulte d’institutions publiques – que le cinéaste tombe sur l’affaire Dalli.
Une affaire dans laquelle l’un des personnages clés est notre bon vieux José Bové, parlementaire des Verts à Bruxelles. Bové s’est impliqué personnellement dans la défense de John Dalli, alors que ce dernier est un opposant politique. José Bové revient d’ailleurs sur l’affaire dans l’un des chapitres de son bouquin, de quoi titiller la curiosité de notre cinéaste.
Par l’intermédiaire de son ami Robert Guédiguian – par ailleurs producteur du film - Antoine Raimbault rencontre ainsi Bové dans son Larzac natal, et prend conscience de l’étendue du complot européen qui entoure le lobby du tabac, Philip Morris en première ligne.
Bien qu’un carton au début du film prévienne le spectateur qu’il s’agit d’une fiction (histoire d’éviter les emmerdes juridiques), Une affaire de principe se base donc sur une affaire politique véridique, qui a secoué le parlement européen. Nous sommes en 2012, et le commissaire à la santé John Dalli est limogé sans préavis pour une broutille (de réunion non déclarée dans l’agenda parlementaire) qui sent la bonne excuse à plein nez. Le député européen José Bové et sa petite équipe décident alors de mener l’enquête…
Une affaire de principe est le second long métrage d’Antoine Raimbault, 5 ans après Une intime conviction. Le film avec Marina Foïs et Olivier Gourmet avait connu un certain succès en 2018, cumulant plus de 400 000 entrées, et racontait déjà une histoire d’erreur judiciaire.
Tout comme son prédécesseur Adults in the Room, le génial film de Costa-Gavras qui retraçait au sein des institutions européennes les négociations autour de la crise de la dette grecque, Une affaire de principe se pose comme un « thriller de bureau » (selon les mots de son réalisateur) extrêmement efficace.
Les intrigues de la politique européenne ont sur le papier tout pour être barbantes. Pourtant, Antoine Raimbault réussi le petit tour de force de rendre l’enquête et ses rebondissements, assez passionnants. Le réalisateur raconte : « Ils ne rencontrent pas leurs sources dans des parking sombres, ne se font pas pourchasser par des tueurs dans les rues de Bruxelles. Leurs armes ce sont des conférences de presse, un smartphone qui recueille une confession, une imprimante qui sort un mail capital... J’ai voulu pleinement assumer ce côté "thriller de bureau", en m’évertuant à donner du souffle." Et du rythme, le film n’en manque pas !
Grâce à une mise en scène adroite et précise (très attachée au sens du détail et à la cohérence de l’intrigue) on bascule au fil des découvertes de simple enquête au nom de la démocratie à complot politique et financier dans les plus hautes sphères du pouvoir. Le portrait dressé des magouilles politiques est passionnant !
La force du projet réside aussi dans le choix des acteurs. Bouli Lanners est plus vrai que nature dans son personnage de Bové moustachu, couillu et grande gueule. Il est accompagné par Thomas VDB (qu’on a notamment aperçu dans Bonne Conduite, de Jonathan Barré et sa clique du Palmashow) qui interprète Fabrice, l’ami et collègue de José ; et par Céleste Brunnquell, jeune coqueluche du cinéma français, très en vogue ces derniers temps (on l’a vu dans la saison 1 d’En Thérapie de Nakache et Toledano, mais aussi l’année dernière dans L’Origine du Mal, Fifi ou encore La Fille de son père).
Bien qu’Une affaire de principe parle de magouilles louches et de lobbies influents, le ton du film est plutôt léger, proposant des séquences comiques tout à fait bienvenues. Frais mais percutant, le nouveau long métrage d’Antoine Raimbault est une vraie réussite ! Espérons que le film trouve sa place dans nos salles de cinéma, au milieu de l’offre pléthorique de films du ce mois de Mai !