Eloge de la contradiction

Le huitième film d'Olivier Nakache et Eric Toledano prend une nouvelle fois la forme d'une comédie dramatique où des sujets sociétaux sont abordés avec légèreté et sincérité.

Comme toujours, il est frappant de constater la justesse de l'écriture. Il serait si facile de tomber dans le cliché quand on parodie un collectif aussi radical que Extinction Rebellion ou un sujet comme l'endettement. Pourtant, les réalisateurs-funambules arrivent subtilement à tourner les situations en dérision sans tomber dans une représentation stéréotypée et apathique. Bien que les personnages soient parfois caricaturés, ils restent entiers, touchants et le tableau général est étonnamment réaliste. Grâce à des acteur.ice.s excellent.e.s et une volonté assumée de montrer les protagonistes sous toutes leurs facettes, le spectateur est amené à s'identifier et à identifier son entourage, ce qui amène une réelle immersion dans le récit.

Le film parle de sujets bien actuels : la crise climatique, l'éco-anxiété, l'endettement, l'addiction, le militantisme... Mais le fil rouge qui relie tous ces points, c'est la contradiction. Chaque personnage vit avec ces propres paradoxes. Valentine (Noémie Merlant) est une bourgeoise-militante qui fait de la récup' et refuse d'encombrer son immense appartement de choses superflues, Henri (Mathieu Amalric) passe la moitié de son temps à aider les personnes surendettées et l'autre moitié à assouvir ses addictions en tentant d'entrer dans un casino où il est interdit de jeu, Albert et Bruno s'engagent progressivement dans un mouvement militant qui semble pourtant à l'opposé de leurs préoccupations initiales. Jamais moralisateur, le film tire sa force de la juste distance établie avec les personnages. Sans aller creuser la psyché de chacun, il laisse une grande liberté d'interprétation au spectateur et ne prend jamais partie. En faisant l'éloge des contradictions que chacun porte en soi, l'œuvre questionne la possibilité de vivre en cohérence avec ses valeurs dans une société irrationnelle. Il nous interroge sur nos convictions, nos doutes et finalement, ce qui fait notre humanité.

Ajoutons à cela une superbe bande-son et la voix de Jacques Brel qui entoure l'œuvre, et nous avons ici une réussite supplémentaire dans la filmographie si singulière de Nakache et Toledano.

"Ni la contradiction n'est marque de fausseté, ni l'incontradiction n'est marque de vérité." Blaise Pascal