Michel Leproux,dentiste cossu,croit vivre le plus beau jour de son existence quand il trouve aux Puces un disque de jazz mythique qu'il cherche depuis une éternité.Mais quand il rentre chez lui pour l'écouter,il est sans cesse dérangé par des intrus,des importuns,des fâcheux,des gêneurs et autres emmerdeurs,et les choses ne vont faire qu'empirer.Patrice Leconte,le réalisateur attitré de l'équipe du Splendid,retrouve ici Christian Clavier,membre éminent de la célèbre bande.Le cinéaste ne s'est pas foulé et propose une mise en scène d'une grande platitude qui jamais ne transcende le matériau théâtral d'origine.Car c'est adapté d'une pièce de Florian Zeller,qu'on peut considérer comme le véritable auteur du film dont il signe scénario,adaptation et dialogues.Le théâtre au cinéma,ça peut donner de bons résultats,voir "Le dîner de cons" par exemple,encore faut-il que la pièce soit de qualité,ce qui n'est en l'occurrence nullement le cas.Le début fait penser aux "Casse-pieds",vieux film de 48 de Jean Dréville dont Yves Robert fit un remake en 91,mais l'histoire glisse ensuite plutôt vers une illustration de la loi de l'emmerdement maximum.Le problème est que tout est grossièrement écrit à la truelle.Les personnages et les situations sont totalement artificiels et on ne rentre pas une seconde dans un scénario cousu de fil blanc qui aligne les conversations fatigantes et les protagonistes univoques et sans âme.Au fil d'un récit erratique,Zeller semble faire le procès d'une certaine bourgeoisie égocentrique dépourvue du moindre affect.Dommage qu'il aie choisi de s'en prendre à un dentiste,personnage fort utile à la société,et pas,au hasard,à un producteur de cinéma,un réalisateur,un acteur ou,tiens,un auteur dramatique.Ce pauvre Michel se voit donc chargé systématiquement et sans la moindre nuance de tous les péchés semble-t-il inhérents à sa caste.Mauvais fils,mauvais mari,mauvais père,mauvais contribuable,mauvais patron,praticien désinvolte,il parait mériter d'après l'auteur la cascade ininterrompue de catastrophes qui s'abat sur lui,et le public est probablement censé s'en réjouir.Si encore c'était drôle,après tout pourquoi pas,mais ça ne l'est que trop rarement et les gags faibles d'une pénible lourdeur se succèdent continument.D'autant que les autres intervenants sont tout aussi détestables,de l'épouse dépressive,prototype de la bourgeoise larguée accro à son psy,à la maîtresse idiote,en passant par le voisin stupide et envahissant,le meilleur ami cocufieur et tapeur et la femme de ménage espagnole râleuse.Le pire est sans doute le fils débile ultra-gauchiste altermondialiste qui permet d'introduire le couplet pro-immigration avec cette famille nombreuse chinoise méga sympathique qui envahit la demeure de Leproux.Mais vas-y,Zeller,prends-les donc chez toi!Au milieu de ce sinistre aréopage,notre dentiste finirait presque par passer pour un bon mec,et son détachement vis-à-vis de tout ce qui l'entoure plutôt sain.Son cynisme et son indifférence face à ce carnaval des allumés ressemble finalement à une protection,matérialisée par son obsession pour son disque de jazz.Le film est porté par un Clavier impérial,dont l'abattage évite à l'ensemble de s'écrouler complètement.De nombreux acteurs de renom lui donnent la réplique,avec des fortunes diverses.Si Carole Bouquet et Stéphane De Groodt s'en sortent plus qu'honorablement,l'habituel cabotinage effréné de Rossy de Palma est insupportable.Notons la bonne performance d'Arnaud Henriet,à qui l'on doit quelques passages amusants en plombier portugais prétendant être polonais,et la présence fugitive de Juliette Poissonnier,actrice souvent vue dans des pubs.