Mes commentaires ne concerneront que peu la fiction policière. Malgré la somme de travail que son écriture a représenté, certains raccourcis d'Une pluie sans fin me paraissent (un peu) faiblards.
Et s'il ne fallait "noter" le film que sous cet angle, je ne lui confèrerai pas la moyenne.
Exemple : le suicide de l'amie du protagoniste et le déchainement de violence qui s'ensuit.
Mais, MAIS, inversement on pourra apprécier :
- les cadrages que ce soit lors des courses poursuites ou des scènes d'intérieur,
- l'ambiance palpable : j'ai eu la désagréable l'impression d'être imprégné de cettepluie sans fin tiède et poisseuse pendant tout le film !
Mais, MAIS (bis), le scénario - comme souvent - n'est d'ailleurs pas le principal propos du film. Le réalisateur le dit lui-même :
Ce film peut être l’occasion de mieux prendre connaissance de ce qui s’est passé, à un moment donné, en Chine.
Alors que nous apprend l'oeuvre de Dong Yue sur la Chine ?
- la rétrocession de Hong Kong à la Chine communiste (1997) est un événement. C'est une manière pour le réalisateur de souhaiter la (triste) bienvenue aux habitants de la presqu'île dans leur nouvelle prison à ciel ouvert.
NB : lors du Climax de la poursuite dans l'usine, l'architecture de l'usine est la prison dans laquelle évoluent le protagoniste et le tueur. Prison de laquelle aucun des deux ne pourra s'échapper.
- l'acquisition de la sécurité en intégrant le systèmecollectiviste est un enjeu important dans la culture chinoise. Mais il y a bien peu d'élus aux postes clés de l'administration.
NB : le protagoniste, simple agent de sécurité, se voit signifier par les "vrais" policiers de descendre d'une voiture embourbée et de pousser dans la boue et sous la pluie.
- un système dans lequel l'usage de la force est permise lorsque l'on porte le badge de la police.
NB : le déchainement de violence cité ci-dessus est l'intériorisation par le héros - qui devient de fait l'anti héros - de la force malsaine détenue par le pouvoir policier. Plusieurs autres références y sont faites durant tout le film (ex : bruit de suspects se faisant tabasser).
- les Chinois forment une foule anonyme où l'individu compte peu. A l'image des images du film et de l'affiche : tous se ressemblent avec le même ciré.
NB : lors de la même course poursuite précitée, la situation renvoie également à une autre métaphore. On peut confondre les 2 protagonistes : il s'agit donc de la mutation du héros vers le côté obscur.
- la modernisation de la Chine, avec la destruction de l'aciérie obsolète, dans un contexte de déconstruction / reconstruction permanente.
D'autres réalisateurs mettent souvent en scène cette évolution permanente, qui se contrefichent des intérêts particuliers, à commencer par Zhang-Ke.
Bref un film dont le fil rouge est bel et bien la Chine, et non pas la série de meurtres.
Et c'est pour cela que je puis dire au final que j'ai apprécié Une pluie sans fin. Ce qui vaut bien plus que la moyenne.
PS : les commentaires sont issus de plusieurs interviews, en particulier celle de Jenny Ulrich qui permet de décrypter les intentions du réalisateur.