La comédie Italienne émergeant à la fin des années 50 avec "I soliti ignoti" notamment n'est que le prolongement logique du néoréalisme. La quête du réel via une approche rigoureusement documentaire se double ici d'une étude sociologique des tares de la société transalpine. À ce titre, la filmographie de Dino Risi est l'une des plus intéressante du genre, évolutive à l'instar de l'Italie qu'il a su documenter avec une précision chirurgicale.
En 1961, le cinéaste réalise "Una vita difficile", sans doute son chef d'oeuvre.
Alors que Silvio, résistant, est sur le point de se faire fusiller par un Allemand, Elena tue ce dernier avant de cacher Silvio dans un moulin reculé de la ville. Quelques années plus tard, journaliste, celui-ci se rend sur les lieux pour une enquête et parvient à séduire de nouveau Elena qui le rejoint à Rome. Alors que celle-ci pensait y trouver un homme riche et établi comme il lui avait promis, elle se rend rapidement compte que le métier de journaliste n'est pas des plus lucratifs. À cela s'ajoute la fierté (bien ou mal) placée de Silvio qui, après avoir notamment dénoncé dans l'un de ses articles de nombreuses personnes de pouvoir, reçoit une proposition de l'un d'entre eux ; contre une énorme somme d'argent, il doit retirer le nom compromettant de l'article. Silvio refuse ce qui lui vaudra 2 ans de prison pour diffamation.
Les nombreuses ellipses du film donnent à voir, en parallèle de la relation de couple et des nombreuses difficultés qui la parsèment, l'évolution du pays via une approche naturaliste. De la seconde Guerre mondiale au boom économique du début des années 60, l'histoire de l'Italie surplombe et investit les destins individuels, parfois à leur corps défendant.
Du reste, l'élégance du cinéma de Risi tient notamment au fait que celui-ci ne juge jamais ses personnages, loin d'une vision manichéenne qui a, par définition, tendance à simplifier les enjeux. La célèbre citation d'Octave dans "La règle du jeu" trouve, avec ce film, un écho particulier. Le drame, disait-il en substance, est que chacun a ses raisons.