Beaucoup de spectateurs d'Une vie secrète pointent du doigt une longueur excessive du film et une certaine répétition narrative. Il est facile de leur rétorquer que traiter d'une (in)action de plus de trois décennies demande plus que 90 minutes, même avec des ellipses, et qu'il n'y a pas forcément des moments spectaculaires quand il s'agit d'évoquer le confinement d'un homme dans un cagibi, durant 33 ans. Au même titre que Lettre à Franco, un peu négligé, hélas, Une vie secrète permet un autre regard sur le Franquisme, un sujet qui n'en finira pas de hanter l'Espagne avant longtemps. Tout est vu à travers les yeux du reclus, ce qui, effectivement, pourrait altérer le rythme du film mais qui se révèle en définitive passionnant puisque les informations du dehors n'arrivent que par bribes. Le danger, cependant, est palpable et bien rendu par une mise en scène sans effets particuliers mais d'une grande précision. Outre l'évidence du suspense permanent (s'en sortira t-il, et quand ?), Une vie secrète réussit à capter l'évolution psychologique de ce prisonnier dans sa propre maison et son lien avec son épouse puis son fils. Le film est aussi un drame intime intense, au-delà des considérations politiques et matérielles de cette claustration. Il fallait un interprète d'exception pour incarner le personnage principal et toute la subtilité du grand Antonio de la Torre n'est pas de trop dans cette lourde tâche. Moins exposé, peut-être, le rôle de Belen Cuesta n'en est pas moins essentiel et l'actrice est prodigieuse sur tous les plans. Enfin, on n'est pas près d'oublier les toutes dernières scènes qui contiennent une émotion à la hauteur de la peur qui a habité tout du long le propriétaire de cette vie secrète qui, à bien des égards, en était à peine une (de vie).