Une vie simple par Sarah Lehu
Au service d’une famille bourgeoise depuis quatre générations, la domestique Ah Tao vit seule avec Roger, le dernier héritier. Producteur de cinéma, il dispose de peu de temps pour elle, qui, toujours aux petits soins, continue de le materner... Le jour où elle tombe malade, les rôles s’inversent...
Couronné de plusieurs récompenses dans les festivals,Une vie simple est le quinzième long métrage de la réalisatrice hongkongaise Ann Hui. Le projet du film est né de la rencontre entre Ann Hui et le célèbre producteur Roger Lee, puisque le scénario expose la relation qu'a eue Roger Lee avec sa domestique Tao Jie.
Le film a donc une résonance très documentaire et sociale, ce qui n'est pas étonnant au vu du parcours de la réalisatrice qui a toujours pris soin de donner une touche de réalisme à ses films.
Comme beaucoup de films actuels,Une vie simple s'intéresse à la fin de vie, ici à celle d'une domestique qui s'est occupée des autres, veillant sur le bien-être moral et physique de la famille de Roger durant quatre générations. Sur ses vieux jours, et après un accident cardiaque, elle accepte mal de devoir être placée dans une maison de retraite où elle ne peut plus mitonner ses bons petits plats. Heureusement, Ah Tao peut compter sur la bienveillance de Roger qui, malgré son emploi du temps surchargé, prend le temps de partager avec elle des choses simples (un repas, une promenade...) lui faisant oublier le quotidien parfois triste et morne des maisons de retraite. C'est grâce à ces moments et aux discussions à la fois drôles et touchantes qu'ont les deux personnages, magistralement interprétés par Deanie Ip et Andy Lau, deux grands comédiens ayant l'habitude de jouer ensemble, notamment des rôles de mère/fils, que le spectateur oublie l'issue certaine du film : la mort de Ah Tao.
Ainsi, Une vie simple nous montre que la mort peut être douce lorsqu'elle est accompagnée et offre une leçon de vie importante que beaucoup trop de gens ont tendance à oublier (et ce, quelle que soit la culture), il faut toujours être reconnaissant de ce que les gens nous ont donné. Que ce soit du temps, de l'amour ou de l'argent, à l'image de ce vieil homme aux allures de profiteur mais qui tout de même, viendra déposer une gerbe de fleurs sur le cercueil d'Ah Tao, nous dévoilant sa reconnaissance et sa tristesse.
Quant à la mise en scène, elle est au service des personnages et du lieu principal du film : la maison de retraite. Nous avons l'impression d'être immergé dans ce lieu, de nous aussi apprendre à connaître les retraités (dont la plupart sont de réels pensionnaires), mais également d'en être pris au piège car, une fois que Ah Tao y entre, elle ne refera que quelques sorties à l'extérieur, toujours aux côtés de Roger. Ces moments, comme des souffles de gaité dans sa vie, sont extrêmement touchants et nous permettent de mieux appréhender la relation entre elle et Roger. Si le film souffre parfois de moments de creux (les choses simples ont tout de même un certain côté ennuyeux et peu cinématographique) l'attention est maintenue par l'extraordinaire performance des deux acteurs principaux et par les portraits touchants des pensionnaires de cette maison de retraite.
Plus léger, que le Amour de Michael Haneke, le film d'Ann Hui traite de thèmes très contemporains, même si son action prend place dans les années 60-70. Il donne la part belle à un cinéma d'auteur, engagé sur des questions sociales, ce qui est devenu rare depuis que Hong-Kong a été rétrocédé à la Chine.