Dépeindre le militantisme corse et représenter la population insulaire ainsi que ses idées et ses valeurs avec réalisme : tel était le défi de Thierry De Peretti. On ne peut dire que le film soit impartial, loin de là compte tenu des idées nationalistes qu'il véhicule. Mais il montre également les fautes, les erreurs du camp militant, apportant une vision un peu plus objective d'un monde dans lequel rien n'est ni tout noir ni tout blanc. Une Vie Violente défend néanmoins ce militantisme et ces idéaux qui auront traversé la Corse durant des années. Le film n'omet pas de montrer comment la presse et donc plus largement ceux qui la lisent considèrent ces actes. Il raconte comment, en se fiant aux "faits" et aux images que rapportent ces médias qui empêchent depuis longtemps la transparence (et ce sur divers sujets), des millions de personnes regarderont ces hommes qui se battent pour leur pays comme des meurtriers qui tuent des innocents. Le film plaide cette cause et la défend corps et âme, s'engageant courageusement à prendre parti pour ce militantisme tant blâmé.



Une représentation formidablement réaliste des insulaires



Le réalisme d'Une Vie Violente est sûrement son principal atout, ou du moins l'élément qui sautera le plus aux yeux des Corses. Comment le film réussit-il ce tour de force ? Par les décors évidemment : ce sont nos rues, c'est chez nous, et on le reconnait. Mais ce réalisme est transmis également et surtout à travers les acteurs : préférant prendre des insulaires pour jouer des insulaires, Thierry De Peretti fait un bon choix à mon sens. Leur jeu est tout à fait convenable, et ce même du point de vue d'un étranger à l'île. Mais pour les insulaires, leur performance prend tout son sens, et c'est pour ça qu'ils méritent d'être cités : Jean Michelangeli, Henry-Noël Tabary, Cédric Appietto, Marie-Pierre Nouveau, Dominique Colombani, et j'en passe... C'est surtout à travers le langage et les répliques qu'on retrouve de véritables Corses dans ces personnages attachants et réalistes. Bien évidemment, l'accent et les expressions insulaires sont au rendez-vous, et sont plutôt réussis. Mais il y a autre chose dans le parler : l'élocution des personnages d'Une Vie Violente n'est pas toujours parfaite, ils se reprennent, ils bafouillent quelquefois, éléments qu'on bannit habituellement des films pour leur préférer un langage sans tâche. Cette perfection linguistique à laquelle on a droit la plupart du temps ôte pourtant un peu de réalisme aux personnages et aux dialogues. Thierry De Peretti choisit de conserver volontairement les bavures linguistiques pour obtenir une façon plus naturelle de parler : on est ainsi plongés dans la conversation, et on a l'impression d'y assister. C'est quelque chose de rare et plutôt plaisant, un détail qui intègre le spectateur à l'action, un choix audacieux mais non moins pertinent du réalisateur.



Une intrigue brumeuse



Le principal problème se pose au niveau d'un scénario manquant de fluidité. La trame n'est pas claire, il manque quelque chose qui lierait les scènes les unes aux autres et rendrait la lecture du métrage plus agréable et plus aisée. C'est là le plus gros point faible du film : s'il avait bénéficié d'un scénario plus soigné, Une Vie Violente aurait pu être excellent. Ceci dit, on parvient tout de même à comprendre l'histoire qui se déroule sous nos yeux, mais peut être que Thierry De Peretti a abusé de la subtilité avec laquelle il voulait la conter. Quelque chose d'un peu plus évident aurait sûrement mieux servi le film.


Autre problème, et le dernier que je puisse recenser : le manque de clairvoyance et d'explications quant aux antagonistes. Le camp ennemi, celui qui procure les enjeux, n'est pas mis en évidence. Présenter la menace comme trouble, invisible et inconnue était peut être l'objectif du réalisateur, mais les conséquences sont toutes autres. Le danger et l'enjeu du film en pâtissent, et ces deux éléments tiennent une place plus qu'importante dans le dernier tiers de l’œuvre. En survolant les explications concernant cette vendetta violente et cruelle, le film provoque chez nous une difficulté à y croire. Certains parleront de ce fait d'une intrigue "capillotractée" par moments, je me contenterai d'évoquer des antagonistes trop dissimulés et une situation mal expliquée.



Une réalisation correcte et une musique savamment utilisée



Efficace, voilà comment je qualifierais la réalisation de De Peretti : pour un cinéaste de son envergure, il se débrouille très bien, car nombre de films nous ont prouvé que le 7ème art est un art difficile, et collectif qui plus est. Offrir un visuel plaisant au spectateur est un défi pour chaque réalisateur, défi que De Peretti relève haut la main. Il filme avec simplicité, pour intégrer encore un peu plus le spectateur au film.


Vient ensuite la musique : les morceaux sont bien choisis, et bien utilisés au sein du film qu'ils accompagnent de manière agréable pour le spectateur. Les insulaires reconnaitront quelques titres corses, qui sont mêlés à d'autres genres.


Les plus observateurs pourront remarquer quelques anachronismes et incohérences dans le film, mais étant bien moins scrupuleuse, je ne blâmerais pas l’œuvre pour ces petites erreurs, surtout sachant qu'il ne s'agit pas d'une grosse production. Tant que ces éléments ne gênent pas la compréhension de l'intrigue, je les considère comme insignifiants.



Terre de valeur(s)



La Corse et ses valeurs... Une notion que le film s'emploie à décrire le plus fidèlement possible, dépeignant des caractères nobles : courage, dévouement, loyauté envers sa terre et envers les siens, et surtout honneur. L'honneur, la plus importante des valeurs, est très justement représentée dans Une Vie Violente.



Qu'est ce que tu es prêt à faire, per a to tarra, pour ta terre ?
- Mourir.



Un héroïsme, un patriotisme impressionnant, mais inspiré de faits réels, est montré dans le film. On admire les personnages qui, même face à une situation plus que compliquée, ne renonceraient pas à défendre la seule chose qui compte : leur terre.


C'est ainsi que Thierry De Peretti montre le militantisme corse, et il ne fait aucun doute que la plupart des insulaires le comprendront de la même manière. En ce sens, Une Vie Violente est un film qui s'adresse aux Corses, chose qu'il fait également par son réalisme et ses personnages. Il n'en reste pas moins un bon film pour tous, un film engagé, un film de valeurs, qui défend une cause juste aux yeux de beaucoup.



Aujourd'hui, qu'est ce que tu peux faire de mieux dans ta vie que te battre pour ton île et pour ton peuple ?


Mia_Landa
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le 28 août 2017

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