En 1945, la France est libérée de l'occupation allemande, de nombreux bâtiments sont en ruines, la population est soulagée, la vie essaie de reprendre son cours. Pourtant, pendant la Guerre, il y avait les collabos, les lâches, les profiteurs, les communistes. Un bon monde que la France n'oublie pas, revancharde, et qu'elle va saisir au tournant lorsque l'occasion se présentera. En 1990, Claude Berri délaisse la comédie et adapte le roman de Marcel Aymé, dépeignant ainsi une réalité oubliée et qui se reflète encore de nos jours : la haine est immortelle.
Un père de famille trouillard, une épouse volage, une fille dévergondée, un enseignant évasif, un patron de bar qui s'improvise poète, des communistes engagés, une gendarmerie dépassée par les évènements et un collaborateur recherché de toutes parts. Tout ce petit monde s'agitant dans une petite ville provinciale aurait pu être les acteurs d'une comédie burlesque sur fond de drame social mais il n'en est rien. Car si l'on rit parfois au détour de dialogues succulents, l'histoire d'Uranus reste triste, sombre, violente. Elle raconte comment des hommes et des femmes vont révéler leur vraie nature dans un moment opportun, dans un moment lourd et profitable pour chacun.
Autour d'une interprétation monstrueuse (Phillipe Noiret, Jean-Pierre Marielle, Gérard Depardieu, Daniel Prévost, Michel Galabru...), le réalisateur de Tchao Pantin nous livre un film poignant où s'entrechoquent des personnalités à la fois merveilleuses et écœurantes dans un décor paradoxalement paisible, débarrassé de toute violence mais qui garde en lui un trop-plein de secrets qui ne demandent qu'à exploser. Et si la mise en scène simple, la maladresse de certaines séquences (l'ultime scène de Depardieu) ou encore la sobriété de la tension présentée, Uranus reste une œuvre impressionnante qui conserve encore toute sa force d'antan.