La force d'un film réussi c'est la plongée de personnages normaux dans un monde qui ne l'est pas. Ou l'absolu inverse.
Guillaume Nicloux l'a bien compris. Et son film est une pépite.
Huppert et Depardieu, deux géants du cinéma français qu'on ose plus présenter, son ici nos comparses. Accessibles comme jamais, il réussissent avec un naturel parfait à se rendre normaux le temps d'un film. Ce naturel, il est sûrement dû à l'ambiguité totale des personnages.
En effet Isabelle et Gérard sont deux acteurs français.
On parle bien ici des personnages. Non des comédiens.
La mise en abyme est totale.
Le scénario bouscule. D'autant plus que Depardieu a connu, à l'image de son personnage, la tragique épreuve de la perte d'un enfant.
Ici le Guillaume de Depardieu est le Mickaël de Gérard et Isabelle.
Celui-ci s'est suicidé. On ne sait pas pourquoi. On ne le saura jamais.
Et d'ailleurs on s'en fout.
L'intérêt du film est ailleurs. Non dans la plainte et les lamentations de parents coupables, non dans la tentative de résolution du mystère de sa mort. Mais plutôt dans la tentative de résolution d'un mystère beaucoup plus grand, beaucoup plus haut.
Le voyage qui s'annonçait touristique se fait mystique.
Le petit drame français se fait Lynchéen.
Ou plutôt Niclouen.
Il y a du Lynch en Guillaume Nicloux qui, grâce à la valorisation de détails infimes et à une série de rencontres absurdes mais puissantes, nous plonge dans un univers bien particulier, dont on ressort bouleversé.
Un voyage intérieur qui remue, fait rire (beaucoup) et fait pleurer.